Nymphomanie, sortez de votre coquille

La nymphomanie est un terme désuet et imprécis qui était autrefois utilisé pour décrire un état caractérisé par un désir ou un comportement sexuel excessif chez les femmes. Empreint d’une forte connotation culturelle, ce terme n’est plus utilisé dans la pratique médicale ou psychiatrique. Entretien réalisé auprès du Dr. Lakshmi Waber, Psychiatre et psychothérapeute au Centre de Psychothérapie Varembé à Genève.

Par Adeline Beijns

Docteur Waber, qu’est-ce que la nymphomanie ? 

La nymphomanie ne fait aujourd’hui plus référence à une diagnostic psychiatrique et fait plus référence à une conception culturelle de la sexualité féminine. Actuellement, l’OMS (ICD-11) fait référence au trouble sexuel compulsif, qui est défini comme un désir ou un comportement sexuel compulsif, c’est-à-dire persistant et intense, qui entraîne une détresse ou une altération du fonctionnement social, professionnel ou d’autres domaines importants. Ce trouble n’est pas limité aux femmes et peut affecter les personnes de tout sexe et met l’accent sur problème de contrôle de l’impulsion comme dans le cadre de la pyromanie ou de la kleptomanie.

Qu’est-ce qui distingue un besoin sexuel important de ce trouble ? 

Le fait d’avoir une forte libido ou d’aimer le sexe n’indique pas nécessairement un trouble ou un problème de santé mentale. Cependant, lorsque le comportement sexuel devient compulsif, interfère avec le fonctionnement quotidien et cause de la détresse ou du tort à soi-même ou aux autres, il peut être le signe d’un trouble hypersexuel et doit être évalué par un professionnel de la santé qualifié. Chez la plupart des patients, on retrouve des éléments dépressifs ou traumatiques sous-jacents.

Est-ce que les personnes souffrant de ce trouble éprouvent du plaisir lors de leurs relations sexuelles ? 

Les personnes concernées peuvent se livrer à un comportement sexuel comme une recherche de plaisir ou de soulagement du stress, de l’anxiété ou d’autres problèmes émotionnels. Cependant, les patients souffrent plus de leur comportement qu’ils n’en retirent du plaisir. La souffrance est au cœur de leur vie qui ne tourne plus qu’autour de leurs activités sexuelles.

Quels sont les risques associés au trouble hypersexuel ?

Les personnes s’exposent à un certain nombre de risques et de conséquences négatives. Ceux-ci peuvent inclure des problèmes relationnels car le comportement sexuel compulsif peut interférer avec les relations amoureuses, entraînant des conflits. Mais aussi des troubles sociaux et professionnels car ces personnes peuvent éprouver des difficultés dans leur travail ou leur vie sociale, comme le fait de manquer le travail ou des engagements sociaux en raison d’activités sexuelles ou de préoccupations liées à des fantasmes sexuels. En adoptant un comportement sexuel à risque, comme des rapports sexuels non protégés avec des partenaires multiples, elles ont aussi un risque accru de contracter des infections sexuellement transmissibles. Elles peuvent aussi souffrir de problèmes financiers en dépensant de grosses sommes d’argent pour acheter de la pornographie, ou financer leurs rencontres sexuelles. Enfin, le caractère compulsif peut aussi engendrer des lésions physiques. 

Est-ce que ce trouble touche autant les femmes que les hommes ? 

Oui ce trouble touche aussi bien les femmes que les hommes alors que les autres comportements addictifs s’observent généralement plus souvent chez les hommes. Internet y est pour beaucoup : l’anonymat, la diversité, la gratuité et l’impression de sécurité des échanges virtuels peuvent conduire au développement d’une compulsion.

Comment traitez-vous vos patients atteints de ce trouble ? 

Pour pouvoir apporter une aide à ces personnes, il est très important de bien identifier l’origine de cette sexualité compulsive car parfois, ce comportement peut être le signe d’une problématique psychiatrique sous-jacente (trouble de l’humeur, trauma, …). Le traitement consistera en une prise en charge médicale globale et en une psychosexothérapie dans le but que la personne puisse se réapproprier sa sexualité.

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