Le cancer métastatique mieux traité

6’200 femmes sont atteintes d’un cancer du sein, chaque année en Suisse. Environ 20 % d’entre elles, seront diagnostiquées avec un cancer du sein métastatique. Ce cancer se traite de mieux en mieux grâce aux nouveaux médicaments anti-cancéreux qui améliorent la survie et la qualité de vie des patientes. Entretien auprès du Dr. Samuel Blaser, Spécialiste en Oncologie médicale à la Clinique Hirslanden des Grangettes. 

Par Adeline Beijns

Qu’est-ce que le cancer du sein métastatique? Est-il fréquent en Suisse ?

Le cancer du sein est le cancer le plus fréquent chez les femmes, avec plus de 6’200 nouveaux cas par an en Suisse, alors qu’il est rare chez les hommes (environ 50 cas par an). Lorsqu’il est encore localisé dans le sein ou si les cellules tumorales ont réussi à atteindre les ganglions lymphatiques situés au niveau des aisselles mais ne sont pas encore allées plus loin comme par exemple dans les os, les poumons ou le foie, il est le plus souvent possible de guérir de cette maladie.

Par contre, lorsque les cellules tumorales ont proliféré en dehors du sein ou des ganglions régionaux, elles forment alors, dans les organes, des amas appelés métastases. Dans ce cas, il devient beaucoup plus difficile d’éradiquer complètement la maladie. Fort heureusement, la plupart des nouveaux diagnostics de cancers du sein ont lieu précocement, au stade localisé, grâce notamment aux campagnes d’information et de dépistage par mammographie chez les femmes de plus de 50 ans.

Quel est le taux de survie des patientes ?

Le taux de survie à 5 ans, tous stades confondus, (localisés et métastatiques) est relativement élevé (87%). Mais, le cancer du sein reste la cause de plus de 1400 décès par an en Suisse. Il convient toutefois de rappeler que les progrès scientifiques récents sont remarquables et améliorent la survie et la qualité de vie des personnes touchées.

L’annonce du diagnostic d’un cancer du sein métastatique doit être une étape délicate pour la patiente et son médecin. Quels types de réactions avez-vous rencontrés ?

Lorsque les patientes viennent me voir en consultation, elles savent généralement pourquoi elles ont rendez-vous avec l’oncologue car le diagnostic leur a déjà été annoncé par leur médecin traitant ou leur gynécologue. C’est à ce moment-là que le choc est le plus fort car un tel diagnostic survient le plus souvent «dans un ciel bleu» sans que l’on ait pu le prévoir ou s’y attendre. Le rôle de l’oncologue est alors d’entendre les craintes des patientes, les informer sur leur situation et les guider dans la mise en place des différents traitements.

Quelles sont les difficultés majeures rencontrées par ces femmes, atteintes d’un cancer du sein métastatique ?

Les difficultés sont hélas nombreuses. On pourrait citer tous les symptômes en lien avec le cancer ou les traitements, comme les douleurs, la fatigue, la difficulté à trouver le sommeil, l’anxiété…Il y a aussi la nécessité de se déplacer fréquemment pour des rendez-vous d’examens médicaux, de consultations ou pour des traitements réguliers. On dit souvent que se battre contre un cancer métastatique est un travail à plein temps, c’est la vérité.

Il y a aussi l’inquiétude de voir que la fin de vie approche ou le sentiment de culpabilité en pensant devenir une charge pour sa famille. C’est pour cela qu’il est important que ces femmes puissent compter non seulement sur leurs proches, mais aussi sur leurs médecins et sur une équipe soignante multidisciplinaire (infirmier-ères, physiothérapeutes, psychologues, nutritionniste, etc.) compétente et empathique.

Quelles sont les difficultés rencontrées par vos patientes, qu’elles n’abordent pas avec vous mais avec les infimier-ères ou leurs familles ?

Nous essayons de tout faire pour que la salle de consultation médicale soit un lieu propice à l’échange sans le moindre sujet tabou. En tant que médecins, nous devons faire tout notre possible pour limiter les barrières de communications et faire en sorte que les patientes se confient, ce qui arrive le plus souvent. Les proches sont régulièrement présents lors des consultations ou des traitements, ce qui permet parfois de recevoir des informations supplémentaires sur les patientes, comme sur la manière dont se déroulent les activités de la vie quotidienne.

Avez-vous déjà vécu une situation où l’attitude d’une patiente face à un effet collatéral du diagnostic ou de la thérapie vous a totalement désarmé (positivement ou négativement) ?

Je suis très régulièrement frappé par la force de caractère et la résilience des patientes qui arrivent à rester positives, aimables, souriantes et drôles malgré les symptômes et l’espoir qui s’amenuise. C’est une leçon de vie pour moi qui me permet de relativiser les petits tracas de la vie quotidienne et prendre conscience de ce qui compte vraiment.

Quels sont les problèmes auxquels ces femmes font face et que la société ne voit pas ?

Je suis stupéfait et déçu de la stigmatisation des personnes qui souffrent d’un cancer actif ou qui ont traversé l’épreuve des traitements et qui souhaitent reprendre ou poursuivre une vie normale.

Cette stigmatisation se voit dans le milieu professionnel mais aussi plus largement dans la société où le culte de la performance et du paraître sont rois. Il faut savoir qu’avec les progrès de la médecine, de plus en plus de patientes vivent avec un cancer du sein métastatique qui devient souvent une maladie chronique. Il incombe à la société d’accepter de laisser à ces femmes la place qui leur revient.

La recherche progresse énormément: quel avenir pour ces femmes ?

Il existe plusieurs types de cancer du sein métastatiques, avec, pour chacun d’entre eux, une prise en charge et des traitements spécifiques. Les progrès récents dans les traitements oncologiques ont permis et permettront encore une amélioration de la qualité de vie des patients. L’avenir est effectivement porteur de beaucoup d’espoir.

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