Le coup de foudre, une question de chimie ?

Vous entendez parfois les gens dire qu’ils ont eu le coup de foudre ou vous-même avez peut-être été « frappé par la foudre » lorsque vous avez rencontré votre partenaire pour la première fois. Est-ce vraiment possible ? Et surtout, que dit la science ? 

Par Adeline Beijns

«Un bouleversement de tous les sens »

C’est en ces termes que Margaux, avocate de 36 ans, explique la vive émotion qu’elle a ressentie lorsqu’elle a rencontré Stéphane à la caisse du supermarché. «Il était derrière moi et attendait patiemment que je mette mes articles sur le tapis roulant. J’ai levé les yeux, et là, «bam», j’ai été figée sur place. Un peu comme dans les films, j’ai l’impression d’avoir été frappée par la foudre et d’avoir eu l’air très bête!». Comment peut-on expliquer ce qu’a ressenti Margaux qui a épousé ce bel homme quelques mois après leur rencontre?

D’après les psychologues, sentir une connexion forte lorsqu’on rencontre quelqu’un pour la première fois est tout à fait possible mais ce que l’on ressent, parfois même dans tout le corps, n’est tout simplement pas le véritable amour. Quand on parle d’amour, on parle d’intimité et d’aimer quelqu’un malgré ses défauts. On ne peut pas ressentir ces choses lors d’une première rencontre, simplement parce que la personne nous est encore inconnue.

Le coup de foudre n’est donc pas un véritable « amour » comme peuvent le ressentir les personnes qui sont ensemble depuis cinquante ans et qui se connaissent par cœur. Il s’agit plus d’une attraction physique qui, par la suite, peut se développer en relation amoureuse.

La science du coup de foudre

Pour les biologistes, le doute n’est pas possible, l’amour est une expérience biologique et non pas culturelle puisque la capacité d’aimer se retrouve dans toutes les cultures et que des comportements similaires peuvent également se retrouver chez certains autres animaux, tels que les campagnols des prairies.

Chez les humains, les buts de toutes les envies, de toutes les folies et de tous les désirs sont la reproduction et l’éducation de la progéniture. Comme il s’agit d’une vaste et longue entreprise, deux parents valent mieux qu’un! Notre cerveau et notre corps sont donc conçus pour nous donner envie de faire l’amour et de nous reproduire puisque l’espèce humaine en dépend. Il n’est donc pas surprenant que nous soyons attirés par des personnes jeunes, fortes et belles: notre corps sait qu’elles sont les meilleures candidates pour faire un enfant.

En d’autres termes, lorsque votre cerveau est attiré par quelqu’un, c’est parce que votre corps sait déjà que vos gènes et ceux de l’être convoité feraient de beaux bébés en bonne santé. Ces dernières années, grâce au progrès de l’imagerie médicale, la possibilité d’observer le cerveau en action a permis de mieux comprendre les mécanismes de l’amour.

Les chercheurs ont montré que lorsqu’une personne tombe amoureuse, une douzaine de parties différentes du cerveau se coordonnent pour libérer certaines substances chimiques telles que la dopamine, l’ocytocine et l’adrénaline dans votre sang, ce qui vous rend extrêmement heureux et excité.

Cette décharge de substances chimiques est ce fameux coup de foudre. Vous avez l’impression que c’est la bonne personne, que tout va s’arranger et que vous serez heureux ensemble pour l’éternité. Mais petit à petit, l’activité du cerveau reprend son cours normal, et les substances chimiques retrouvent leurs niveaux normaux. Il en est alors fini de l’excitation et de l’exaltation de la romance.

Ce retour à la normale intervient en principe après trois ans, âge à partir duquel l’enfant est capable de se débrouiller tout seul et où un seul parent peut suffire. L’amour est-il donc condamné à ne durer que ce maigre temps comme le prétend Frédéric Beigbeder dans son livre « L’amour dure trois ans » ? Selon la neurobiologiste Lucy Vincent, auteure de «Petits arrangements avec l’amour», la pérennité d’une relation dépend essentiellement du niveau d’engagement des partenaires et des efforts qu’ils sont prêts à faire. Bonne nouvelle, il n’y aurait donc pas de date de péremption.

Et sur le long terme ?

Les travaux d’Ayala MalackPines, ancienne psychologue à l’Université BenGourion en Israël et auteure de nombreux livres sur le sujet, a découvert que seule une petite fraction (11 %) des personnes dans une relation à long terme avaient déclaré avoir eu le coup de foudre au départ, prouvant qu’une meilleure connaissance de l’autre et la nécessité de tisser des liens sur une plus longue période, étaient nécessaires à une relation durable. Autrement dit, le coup de foudre existe mais il n’y a aucune garantie que cette forme d’amour intense se transformera en un amour plus stable et plus profond, comme c’est le cas dans les relations à long terme.

L’Amour est-il unique ?

L’analyse des cerveaux des amoureux permet également d’affiner la compréhension des différentes formes d’amour. Helen Fisher, anthropologue américaine et auteure du livre «Why we love: the nature and chemistry of romantic love» (Pourquoi nous aimons), suggère qu’au fil de l’évolution, nous avons développé trois systèmes dans le cerveau pour assurer l’accouplement et la reproduction à savoir, le désir (l’appétit sexuel ou libido), le sentiment amoureux et l’attachement qui se traduit par un profond sentiment pour un partenaire de longue date.

Bien qu’un certain chevauchement soit possible et que l’amour puisse commencer par n’importe lequel de ces trois états, il s’agit de phénomènes distincts, avec leurs propres systèmes émotionnels et motivationnels, et les substances chimiques qui les accompagnent. Et c’est précisément là que son analyse devient dangereuse : puisque ces systèmes sont indépendants, ils peuvent fonctionner simultanément « vous pouvez ressentir un profond attachement pour un conjoint de longue date, tandis que vous ressentez un amour romantique pour quelqu’un d’autre, tandis que vous ressentez la pulsion sexuelle dans des situations sans rapport avec l’un ou l’autre des partenaires». Il est donc tout à fait possible d’aimer plus d’une personne à la fois, c’est la science qui le dit !

Cet article vous a plu ?
Abonnez-vous à la version papier Salle d’attente pour avoir accès à toutes les informations sur le sujet: témoignages, tests, adresses utiles, infographies et autres.
Alors n’attendez-plus !
CHF39.00

Loading

Partagez sur

Facebook

Plus d’articles :

Allergies : quand le corps dit non

La survenue d’une allergie peut bouleverser la vie de celles et ceux qui en souffrent. Qu’il s’agisse de réactions légères ou de véritables urgences, chaque témoignage apporte un éclairage précieux sur la diversité de ces sensibilités. Découvrons les parcours de six personnes confrontées à ces défis.

Loading

Lire la suite »

Quand le pollen s’invite : les clés pour en limiter l’impact

Avec l’arrivée des beaux jours, le pollen refait surface, transformant pour beaucoup le plaisir du printemps en une série d’éternuements et de mouchoirs. Mais qu’est-ce qui se cache derrière cette allergie si courante et souvent sous-estimée ? Pour démêler les mystères de la rhinite allergique saisonnière et offrir des solutions concrètes, nous avons interrogé la Dre. Jacqueline Wassenberg, spécialiste en allergologie, immunologie clinique et pédiatrie.

Loading

Lire la suite »

Désensibilisation, le chemin vers un printemps serein

Chaque année, lorsque les arbres bourgeonnent et que les fleurs éclosent, des millions de personnes accueillent le printemps avec un mélange de joie et d’appréhension. Pour les enfants allergiques au pollen, comme le fils de Mahéva, cette saison rime souvent avec nez qui coule, yeux qui piquent et journées gâchées. Mais grâce à la désensibilisation, aussi appelée immunothérapie, une lueur d’espoir s’est allumée dans leur quotidien. Dans cet entretien, Mahéva, maman d’édouard, 8 ans, autrefois contraint par son allergie, nous raconte comment elle a bouleversé leur vie, les solutions qu’ils ont explorées et, surtout, comment ce traitement a redonné à son fils le goût des jours ensoleillés

Loading

Lire la suite »

SEP, maternité et vie professionnelle

La sclérose en plaques (SEP) est une maladie chronique auto-immune qui affecte le système nerveux central. Concrètement, cela signifie que le système immunitaire attaque par erreur la gaine protectrice (myéline) entourant les nerfs, provoquant des troubles neurologiques variés tels que des pertes de sensibilité, des difficultés motrices, des problèmes d’équilibre ou de vision, et une fatigue intense.

Loading

Lire la suite »

Une toux inoffensive ?

Walter Käser, âgé de 82 ans, vit aujourd’hui avec une toux qui ne disparaîtra jamais. Ce qui semblait d’abord anodin est devenu un compagnon constant et a finalement conduit au diagnostic de fibrose pulmonaire idiopathique. Cette maladie a bouleversé sa vie, mais avec sa femme Renate, 80 ans, ils relèvent ensemble les défis du quotidien. Ils ont appris à s’adapter, à ajuster leurs habitudes et, malgré les contraintes, à trouver des instants de bonheur.

Loading

Lire la suite »

Démêler le vrai du faux sur la schizophrénie

La schizophrénie reste l’une des maladies mentales les plus mal comprises. Souvent entourée de préjugés, elle suscite encore une peur injustifiée dans l’imaginaire collectif. Pourtant, cette maladie complexe, qui touche environ 1% de la population, mérite d’être mieux connue pour que les patients puissent recevoir le soutien dont ils ont besoin.

Loading

Lire la suite »