Les yeux, reflets de notre santé

On dit souvent que les yeux sont le reflet de l’âme. Derrière nos pupilles, se cachent de précieux organes qui donnent de nombreuses informations concernant notre état de santé générale. Pleins feux. Entretien réalisé auprès de la Dr. Anna Fierz, Ophtalmologue FMH à Zürich.

Par Adeline Beijns

Vous êtes ophtalmologue, pourquoi avez-vous choisi cette spécialisation ? 

Il s’agit d’une histoire transgénérationnelle. Ma grand-mère maternelle a étudié la médecine pendant un an avant de se marier. Ma mère a étudié la médecine et s’est mariée juste après l’examen d’État. C’est elle qui m’a encouragé à faire des études. J’ai choisi moi-même ma spécialisation. L’œil me semble être à la fois le plus beau et l’un des plus utiles de nos organes. Aider à préserver sa fonction, ce n’est pas donner plus d’années à la vie, mais plus de vie aux années.

On dit souvent que les yeux sont le reflet de l’âme. Il y a aussi des maladies qui se manifestent dans les yeux. Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet ? 

De nombreuses maladies qui se manifestent au niveau de l’œil ont une origine et une localisation extérieures à l’œil. Je peux vous citer plusieurs exemples. Prenez le cas d’un anneau blanc autour de la pupille : il est dû à l’accumulation de lipides dans la cornée et peut être normal chez les personnes âgées. S’il apparaît chez des personnes plus jeunes, il convient de mesurer les taux de lipides sanguins.

Par ailleurs, lors d’un examen de la rétine, certaines maladies circulatoires peuvent être détectées telles que l’hypertension artérielle. Un diabète mal contrôlé peut quant à lui aussi provoquer de graves lésions oculaires. Aujourd’hui, il est généralement possible d’éviter cela. La condition préalable est de procéder à des contrôles ophtalmologiques réguliers : dans le cas du diabète de type 1, à partir de cinq ans après le diagnostic, et dans le cas du diabète de type 2, dès que le diagnostic est posé.

Quant aux infections dues au virus de l’herpès, elles sont particulièrement gênantes et peuvent entraîner des troubles visuels permanents au niveau de l’œil, qu’il s’agisse de l’herpès simplex ou de l’herpès zoster. Si l’herpès se manifeste au niveau de l’œil, il faut donc consulter un ophtalmologue.

Que nous disent nos pupilles ?

La taille de la pupille varie considérablement d’une personne à l’autre et est en outre contrôlée par le système nerveux végétatif. Des pupilles de taille inégale peuvent être le signe d’une maladie. Si une pupille est en permanence plus grande que l’autre, cela peut être la conséquence d’une ancienne blessure. En revanche, si une telle asymétrie est récente sans accident connu, elle doit absolument être examinée car elle peut parfois cacher une dilatation des vaisseaux cérébraux ou être la conséquence d’une pression sur les nerfs longs et complexes qui contrôlent les pupilles.

Mais l’œil n’est pas seulement une fenêtre sur le corps et est aussi le miroir de l’âme. C’est ainsi que la fatigue réduit la taille des pupilles, tandis que c’est l’inverse en cas de nervosité ou d’excitation. Les personnes souffrant de troubles anxieux ont parfois des pupilles remarquablement grandes. Mais parfois, les pupilles peuvent être particulièrement grandes pour une toute autre raison comme en cas d’excitation sexuelle qui entraîne leur dilatation. Pour vous donner une anecdote, il est prouvé que les hommes trouvent les femmes avec des pupilles plus larges, plus attirantes. Cela explique le nom botanique de la plante belladone, dont le venin dilate les pupilles : Atropa belladonna. Il ne faut pas non plus oublier que certaines drogues modifient les pupilles : la cocaïne et les substances apparentées les dilatent, la morphine et les opiacés les rétrécissent ; en fonction de leurs effets sur le système nerveux végétatif et sur le psychisme.

Qu’en est-il des maladies inflammatoires ?

Les maladies inflammatoires qui affectent l’ensemble du corps peuvent également se manifester au niveau des yeux. Dans ce cas, l’œil peut devenir rouge et douloureux, et la vision est moins bonne (on parle alors d’uvéite antérieure). Si l’inflammation touche les parties les plus postérieures de l’œil, la rougeur est absente et la vision est altérée, avec ou sans douleur (c’est ce qu’on appelle une uvéite postérieure). Les causes sont diverses, allant des maladies rhumatismales aux infections comme la syphilis par exemple. Ne vous étonnez donc vous voir poser des questions indiscrètes dans un cabinet d’ophtalmologie.

Ces affections peuvent également affecter le nerf optique à l’arrière de l’œil comme dans la sclérose en plaques. Dans ce cas, l’œil a une apparence tout à fait normale, mais il voit moins bien et la réaction de la pupille est retardée. D’autres maladies peuvent causer une atteinte du nerf optique et altérer la fonction de l’œil.

Les vaisseaux sanguins peuvent-ils aussi être inflammés ? 

Les inflammations des vaisseaux sanguins sont rares, mais font partie des maladies les plus dangereuses de l’œil. Un exemple qui mérite d’être mentionné est l’artérite à cellules géantes. Elle touche les personnes à partir de la cinquantaine et se manifeste par des symptômes neurologiques variés notamment des maux de tête et souvent un état de fatigue générale voire des rhumatismes aigus. Le diagnostic est une urgence et repose notamment sur un test sanguin de détection de l’inflammation. Si elle n’est pas traitée, il n’est pas rare qu’elle entraîne la cécité mais aussi des accidents vasculaires cérébraux ou des dilatations de l’aorte qui peuvent être fatales.

Quelle est la maladie qui a le plus d’effets négatifs sur les yeux ? 

Sans aucun doute, le diabète s’il n’est pas bien contrôlé. Je recommande donc aux personnes souffrant de cette maladie de faire des contrôles réguliers chez l’ophtalmologue.

Pour plus d’informations :

Cet article vous a plu ?
Abonnez-vous à la version papier Salle d’attente pour avoir accès à toutes les informations sur le sujet: témoignages, tests, adresses utiles, infographies et autres.
Alors n’attendez-plus !
CHF39.00

Loading

Partagez sur

Facebook

Plus d’articles :

Retrouver son souffle grâce à la réhabilitation pulmonaire

Souffle court, essoufflement au moindre effort, isolement social : voilà les difficultés auxquelles doivent faire face de nombreuses personnes souffrant de maladies respiratoires chroniques. La réhabilitation pulmonaire offre une réponse adaptée et multidisciplinaire permettant non seulement d’améliorer le souffle mais aussi de diminuer le handicap et favoriser la resocialisation des patients. Pour mieux comprendre les spécificités de cette thérapie, nous avons rencontré le Professeur Jean-Paul Janssens, pneumologue et responsable du programme de réhabilitation pulmonaire ambulatoire à l’Hôpital de La Tour et Nicolas Beau, physiothérapeute et co-responsable du même programme.

Loading

Lire la suite »

Le secret des centenaires

Chers lecteurs et lectrices, je me considère comme une véritable ambassadrice d’une belle cause : celle de la recherche sur la longévité. Pourquoi ? Parce qu’elle nous offre des clés pour vivre en meilleure santé et plus longtemps. Mais parlons chiffres : quel est l’objectif des chercheurs ? Viser 120 ans, et ce, en pleine forme ! Certains vont même jusqu’à envisager 130 voire 150 ans. Des projections ambitieuses, peut-être trop. Pour ma génération et probablement les suivantes, ces chiffres relèvent encore de la science-fiction. Mais vivre 90 ans en bonne santé ou même atteindre les 100 ans semble de plus en plus à notre portée.

Loading

Lire la suite »

Nutrition : grands mythes ou réalité ?

Dès que l’on s’intéresse de plus près à la nutrition, on est confronté à une multitude d’informations et de mythes, au point que même les personnes soucieuses de leur santé peuvent se poser des questions. Ces croyances, anciennes ou nouvelles, sont-elles fondées ? Qu’est-ce qui est vrai ? Qu’est-ce qui n’est plus d’actualité ? En tant qu’expert, je souhaite éclaircir certaines des idées reçues les plus courantes en m’appuyant sur des connaissances scientifiques actuelles. Mes conseils pratiques vous aideront à appliquer ces découvertes au quotidien.

Loading

Lire la suite »

Les clés d’un diabète bien géré

Le diabète touche des millions de personnes à travers le monde, et sa prise en charge repose sur un équilibre subtil entre suivi médical, technologie et engagement du patient. À Lausanne, la Dre. Daniela Sofra, endocrinologue et diabétologue passionnée, met son expertise au service d’une approche collaborative. Dans cette interview, elle nous éclaire sur l’importance d’une coopération étroite avec les médecins généralistes et sur le rôle transformateur des capteurs de glucose en continu (CGM pour Continuous Glucose Monitoring) dans la vie des patients.

Loading

Lire la suite »