Maladie des os de verre : quand la fragilité n’empêche pas la force

On l’appelle la « maladie des os de verre » en raison de la fragilité extrême du squelette, à l’image d’un verre que l’on pourrait briser au moindre choc. Cette pathologie, dont le nom médical est ostéogenèse imparfaite, est rare mais peut se manifester dès la naissance ou plus tard au cours de l’enfance. Vivre avec des os qui se fracturent facilement est un défi de tous les jours, mais grâce aux avancées médicales et à l’accompagnement adapté, de nombreuses personnes atteintes de cette maladie mènent aujourd’hui une vie active. | Adeline Beijns

A la découverte de la maladie

Il s’agit d’une affection génétique caractérisée par un défaut de production ou de structure du collagène de type I, une protéine essentielle à la solidité des os. Selon des données rapportées par Orphanet, l’ostéogenèse imparfaite toucherait environ 1 naissance sur 10’000 à 20’000¹. Cette fourchette reflète la grande variabilité de la maladie, qui peut être plus ou moins sévère d’un individu à l’autre. Si certains enfants présentent des fractures multiples dès les premières semaines de vie, d’autres ne découvrent leur fragilité osseuse qu’au détour d’une fracture banale plus tard dans l’enfance.

Causes et facteurs génétiques

La majorité des cas sont liés à une mutation dans les gènes responsables de la synthèse du collagène de type I (COL1A1 et COL1A2). Dans environ 90% des cas1, il s’agit d’une transmission autosomique dominante : il suffit qu’un parent porte la mutation pour la transmettre à l’enfant. Toutefois, certaines formes plus rares suivent d’autres modes de transmission ou résultent d’une mutation spontanée, apparaissant sans antécédent familial connu.

Symptômes et signes cliniques

La fragilité osseuse est le signe emblématique. Les fractures peuvent survenir pour un choc léger, voire en tombant du canapé ou en se cognant à un coin de table. D’autres symptômes peuvent inclure une coloration bleutée de la sclère (la partie blanche de l’œil), une dentition fragile (dentine défectueuse, on parle alors de dentinogenèse imparfaite), une surdité progressive due à la dégénérescence osseuse au niveau de l’oreille interne ou encore un retard de croissance. La gravité varie : on recense aujourd’hui plusieurs types d’ostéogenèse imparfaite, classés de I à V selon l’intensité des manifestations cliniques.

Diagnostic et dépistage

Le diagnostic peut être évoqué dès la grossesse lors d’une échographie qui montre des os longs fracturés ou de petite taille. Après la naissance, la répétition de fractures inexpliquées est souvent le premier signal d’alarme. Des examens radiologiques, une analyse génétique et parfois des dosages biochimiques permettent de confirmer l’ostéogenèse imparfaite. Dans les cas sévères, la pathologie est détectée très tôt, tandis que pour les formes plus légères, le diagnostic peut se faire à l’âge adulte, parfois à la suite d’une banale entorse qui révèle des os plus fragiles que la normale.

Traitement et gestion de la maladie

Il n’existe pas, à ce jour, de traitement curatif qui permette de « guérir » la maladie. Cependant, la prise en charge a fait des progrès considérables grâce à une approche multidisciplinaire. Les médicaments de la famille des bisphosphonates sont souvent prescrits pour renforcer la masse osseuse et réduire le risque de fractures. La physiothérapie a un rôle crucial pour améliorer la force musculaire et l’équilibre. Dans certains cas, la chirurgie est nécessaire pour stabiliser les os à l’aide de broches ou de tiges intra-médullaires qui limitent le risque de nouvelles fractures.

Qualité de vie et prévention des fractures

Le risque de fracture étant élevé, l’enjeu principal est de réduire les situations dangereuses et de favoriser l’autonomie. Des aménagements dans l’habitat, comme la pose de rampes ou l’utilisation de fauteuils roulants adaptés, permettent de limiter les chutes. L’activité physique, recommandée sous supervision, aide à maintenir la densité osseuse et la tonicité musculaire; la natation, par exemple, est souvent plébiscitée pour son faible impact sur les articulations. Au-delà de la prévention physique, il existe un fort enjeu psychologique : le soutien familial et l’accompagnement psychologique sont essentiels pour aider tant les enfants que les adultes à vivre avec la douleur et les contraintes quotidiennes.

Regards vers l’avenir

La recherche continue de progresser, notamment sur les thérapies géniques pour cibler directement la mutation en cause ou sur de nouvelles molécules pour consolider la trame osseuse. Des études en cours explorent également l’optimisation des protocoles de rééducation ou l’utilisation de techniques chirurgicales moins invasives. Bien que rare et complexe, la maladie des os de verre fait l’objet d’une prise en charge de plus en plus structurée, qui mobilise pédiatres, chirurgiens orthopédiques, physiothérapeutes, généticiens et psychologues. Les progrès de la science et la bienveillance de l’entourage demeurent les piliers pour aider chaque personne atteinte à construire sa propre trajectoire de vie. 

Référence :
1. https://www.orpha.net/consor/cgi-bin/OC_Exp.php?lng=FR&Expert=666

Cet article vous a plu ?
Abonnez-vous à la version papier Salle d’attente pour avoir accès à toutes les informations sur le sujet: témoignages, tests, adresses utiles, infographies et autres.
Alors n’attendez-plus !
CHF39.00
Ou abonnez-vous directement pour 8 éditions !
CHF78.00

Loading

Partagez sur

Facebook

Plus d’articles :

De la perte à la repousse

La perte soudaine de cheveux peut sembler anodine au départ, jusqu’à ce qu’elle devienne préoccupante et affecte profondément l’estime de soi. Angèle, 36 ans, responsable des ressources humaines, dynamique et sportive, ne s’attendait absolument pas à être confrontée à cette situation.

Loading

Lire la suite »

Partie 2 – La salle d’attente : le couloir de l’ombre

Daniela Vaucher a traversé deux cancers et est aujourd’hui en rémission. Pendant toute la durée de ses traitements, c’est dans la salle d’attente de son oncologue qu’elle a tenu son journal intime – un refuge de mots et d’émotion face à l’inconnu. Elle partage avec nous son parcours, entre doutes, espoir et résilience.

Loading

Lire la suite »

Lumière bleue et santé : qu’en est-il ?

La lumière fait partie de notre quotidien. Elle nous éclaire, rythme nos journées et conditionne notre sommeil. Mais depuis l’arrivée massive des LED – dans nos ampoules, nos écrans, nos phares de voiture – une question revient sans cesse : la lumière bleue est-elle dangereuse pour la santé ? Et surtout, comment protéger petits et grands de ses effets indésirables ?

Loading

Lire la suite »

Blépharite : quand les yeux dictent le quotidien

La blépharite, cette inflammation chronique des paupières qui touche des millions de personnes dans le monde, reste souvent méconnue malgré ses impacts sur le bien-être quotidien. Caractérisée par des rougeurs, des démangeaisons et une sensation de brûlure, elle peut transformer des gestes simples comme se maquiller ou lire en véritables épreuves. Pour mieux comprendre cette affection et ses répercussions, nous avons rencontré Nathalie, une femme de 78 ans active et dynamique, qui a accepté de partager son expérience personnelle.

Loading

Lire la suite »

Dépistage, ouvrez l’œil : détection et traitement précoce des maladies de la rétine

La santé oculaire est une évidence pour la plupart des gens. Pourtant, les maladies de la rétine peuvent altérer la vision de manière insidieuse et durable. Aujourd’hui, des thérapies modernes offrent des perspectives qui étaient encore impensables il y a quelques décennies. Dans cet entretien, le Prof. Matthias Becker, médecin-chef et directeur du centre de recherche de la clinique d’ophtalmologie de l’Hôpital de Zürich Triemli, nous livre un aperçu des avancées actuelles en matière de diagnostic et de traitement des maladies rétiniennes.

Loading

Lire la suite »

CGM et suivi médical : les clés d’une meilleure qualité de vie avec le diabète

Le diabète de type 2 est une maladie chronique qui touche des millions de personnes, mais chaque parcours est unique. Christine, employée de commerce de 60 ans, partage avec nous son expérience de vie avec cette maladie, diagnostiquée il y a vingt ans. Entre les défis du quotidien, l’évolution des technologies comme le capteur de mesure continue du glucose (CGM) et un suivi médical adapté, elle nous raconte comment elle a appris à gérer son diabète tout en préservant sa qualité de vie.

Loading

Lire la suite »