Dites stop à la surexposition : protéger ses yeux à l’ère du numérique

Les écrans sont devenus omniprésents dans notre quotidien, qu’il s’agisse de consulter son smartphone dès le réveil, de passer la journée devant un ordinateur au travail ou de se détendre en regardant des séries le soir. Pourtant, derrière cette facilité d’accès à l’information et aux divertissements, nos yeux se retrouvent souvent en première ligne. La fatigue oculaire, les maux de tête, la perturbation du sommeil ou encore la difficulté à se concentrer ne sont que quelques-unes des conséquences liées à un usage intensif des écrans. Comment protéger nos yeux sans pour autant nous couper d’un monde toujours plus numérique ? | Adeline Beijns

Quand la lumière bleue nous joue des tours

Les effets de la lumière bleue émise par les écrans sur notre horloge biologique sont régulièrement soulignés par les médecins et opticiens. Certaines études, comme celles relayées par l’American Optometric Association, estiment que le syndrome de vision informatique (Computer vision syndrome) touche près de 50 à 90% des personnes qui travaillent quotidiennement devant un écran1.

Ce syndrome se caractérise par une vision floue, des picotements, des irritations oculaires et parfois même des douleurs dans le cou ou dans le dos. Il ne s’agit pas d’une fatalité, mais plutôt d’un signal d’alarme. À force de fixer des écrans, nous clignons moins souvent des yeux, nous changeons moins de focalisation et nous maintenons souvent des postures contraignantes.

Le soir, la lumière bleue perturbe la production de mélatonine, l’hormone qui régule notre cycle de sommeil. Résultat : endormissement tardif et nuits hachées, qui nuisent à la récupération et à la concentration. 

Les risques d’une surexposition

Pour les enfants, le risque va bien au-delà des désagréments visuels. Avant l’âge de 6 ans, leur cerveau est en pleine construction, et les multiples sollicitations numériques peuvent nuire à l’apprentissage du langage et aux interactions sociales. L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) recommande d’ailleurs de limiter drastiquement le temps d’écran chez les tout-petits2, tandis que des chercheurs de l’Inserm ont observé un risque plus élevé de troubles de l’attention et de difficultés d’apprentissage chez les enfants surexposés3. Les adolescents et les adultes ne sont pas épargnés non plus, avec des risques variés allant de la baisse de productivité au travail jusqu’à l’addiction aux réseaux sociaux. Faire défiler à l’infini des fils d’actualité, comparer sa vie à celle des autres ou recevoir sans cesse des notifications peut engendrer des sentiments de stress, de dévalorisation et une difficulté grandissante à se concentrer. Dans de nombreux cas, cette surexposition s’accompagne d’une sédentarité accrue et d’une posture inadaptée, ce qui peut favoriser les douleurs cervicales et dorsales. Les conséquences sur le bien-être global sont donc multiples et exigent une prise de conscience collective.

Les bons gestes à adopter

Le numérique n’a pas que des effets néfastes : c’est aussi un outil précieux pour l’apprentissage, le travail à distance et le maintien du lien social. Cependant, il est essentiel d’appliquer quelques règles simples pour ménager ses yeux et son esprit. Les ophtalmologues recommandent souvent la règle du 20-20-20, à savoir quitter l’écran toutes les vingt minutes pour fixer un point situé à environ six mètres pendant vingt secondes. Cette courte pause repose les muscles oculaires et stimule le clignement des yeux, réduisant ainsi la sécheresse oculaire et les irritations.

L’ergonomie du poste de travail est tout aussi importante. Veiller à ce que la luminosité ambiante et celle de l’écran soient équilibrées, installer l’ordinateur perpendiculairement à une source de lumière et maintenir l’écran à une distance d’au moins 50 centimètres du visage sont des mesures clés. Ajuster la hauteur de l’écran au niveau des yeux évite de trop incliner la tête vers l’avant, ce qui prévient les tensions au niveau des cervicales. Pour se prémunir des effets de la lumière bleue, de nombreuses solutions existent : filtres anti-lumière bleue intégrés aux appareils, lunettes spécifiques ou mode « nuit ». Ces dispositifs peuvent aider, mais ils ne dispensent pas de faire des pauses régulières ni de respecter les règles d’ergonomie. 

Limiter le temps d’écran demande une certaine discipline. Dans les familles, instaurer des moments sans écrans (à table ou après une certaine heure) peut aider petits et grands à se recentrer sur d’autres activités. Dans le cadre professionnel, programmer des plages de travail sans interruption, désactiver les alertes sonores et privilégier parfois des échanges en direct plutôt que par messagerie instantanée sont des pistes à explorer. 

Vers un usage plus conscient : éducation et déconnexion

Pour les enfants et les adolescents, l’éducation numérique est primordiale. Il est important de leur expliquer le fonctionnement d’Internet et des réseaux sociaux, ainsi que l’influence des publicités et des algorithmes sur leur attention. Les inciter à exercer un sens critique, à privilégier des activités en plein air et à adopter des habitudes saines autour de la technologie permet de prévenir de nombreuses difficultés ultérieures. Dans un monde hyperconnecté, nos yeux, véritables fenêtres sur le monde, méritent toute notre attention. En respectant quelques règles simples, on peut tirer parti des immenses possibilités offertes par le numérique sans en subir les désagréments. 


Références :
1. https://www.aoa.org/healthy-eyes/eye-and-vision-conditions/computer-vision-syndrome?sso=y
2. https://www.who.int/publications/i/item/9789241550536
3. https://presse.inserm.fr/ecrans-et-developpement-cognitif-de-lenfant-le-temps-dexposition-nest-pas-le-seul-facteur-a-prendre-en-compte/67438/#:~:text=L’%C3%A9quipe%20de%20recherche%20a,langage%20et%20de%20l’autonomie

Cet article vous a plu ?
Abonnez-vous à la version papier Salle d’attente pour avoir accès à toutes les informations sur le sujet: témoignages, tests, adresses utiles, infographies et autres.
Alors n’attendez-plus !
CHF39.00
Ou abonnez-vous directement pour 8 éditions !
CHF78.00

Loading

Partagez sur

Facebook

Plus d’articles :

Désensibilisation, le chemin vers un printemps serein

Chaque année, lorsque les arbres bourgeonnent et que les fleurs éclosent, des millions de personnes accueillent le printemps avec un mélange de joie et d’appréhension. Pour les enfants allergiques au pollen, comme le fils de Mahéva, cette saison rime souvent avec nez qui coule, yeux qui piquent et journées gâchées. Mais grâce à la désensibilisation, aussi appelée immunothérapie, une lueur d’espoir s’est allumée dans leur quotidien. Dans cet entretien, Mahéva, maman d’édouard, 8 ans, autrefois contraint par son allergie, nous raconte comment elle a bouleversé leur vie, les solutions qu’ils ont explorées et, surtout, comment ce traitement a redonné à son fils le goût des jours ensoleillés

Loading

Lire la suite »

SEP, maternité et vie professionnelle

La sclérose en plaques (SEP) est une maladie chronique auto-immune qui affecte le système nerveux central. Concrètement, cela signifie que le système immunitaire attaque par erreur la gaine protectrice (myéline) entourant les nerfs, provoquant des troubles neurologiques variés tels que des pertes de sensibilité, des difficultés motrices, des problèmes d’équilibre ou de vision, et une fatigue intense.

Loading

Lire la suite »

Une toux inoffensive ?

Walter Käser, âgé de 82 ans, vit aujourd’hui avec une toux qui ne disparaîtra jamais. Ce qui semblait d’abord anodin est devenu un compagnon constant et a finalement conduit au diagnostic de fibrose pulmonaire idiopathique. Cette maladie a bouleversé sa vie, mais avec sa femme Renate, 80 ans, ils relèvent ensemble les défis du quotidien. Ils ont appris à s’adapter, à ajuster leurs habitudes et, malgré les contraintes, à trouver des instants de bonheur.

Loading

Lire la suite »

Démêler le vrai du faux sur la schizophrénie

La schizophrénie reste l’une des maladies mentales les plus mal comprises. Souvent entourée de préjugés, elle suscite encore une peur injustifiée dans l’imaginaire collectif. Pourtant, cette maladie complexe, qui touche environ 1% de la population, mérite d’être mieux connue pour que les patients puissent recevoir le soutien dont ils ont besoin.

Loading

Lire la suite »

Traiter la spasticité de manière ciblée : au plus tôt, au mieux c’est

La spasticité est fréquente dans des maladies telles que l’AVC, la sclérose en plaques, la paralysie cérébrale ou les lésions de la moelle épinière. Ce trouble est causé par un dysfonctionnement des nerfs qui régulent les mouvements musculaires, entraînant une tension excessive. La spasticité peut limiter la mobilité des bras ou des jambes, provoquer des douleurs, des problèmes articulaires et d’autres complications. Un traitement précoce et ciblé permet de soulager ces symptômes, de préserver la mobilité et d’améliorer la qualité de vie. Entretien avec Dre. Inge Eriks Hoogland, Dre. Audrey Weaver et Dr. Henrik Rühe.

Loading

Lire la suite »