Le rôle des tests génomiques dans le cancer du sein

Tests génomiques

Chaque année, des milliers de femmes font face au diagnostic de cancer du sein. Si ce combat reste éprouvant, les avancées médicales, notamment l’utilisation de tests génomiques, permettent aujourd’hui d’affiner les traitementspour mieux répondre aux caractéristiques propres de chaque patiente. Le Dr. Mathieu Chevallier, oncologue à la Clinique Générale-Beaulieu à Genève et membre du Centre du Sein Swiss Medical Network, nous parle du parcours de l’une de ses patientes et explique comment ces nouvelles technologies révolutionnent la prise en charge. 

Par Adeline Beijns

Test génétique & test génomique : la différence

Un test génétique peut mesurer votre risque héréditaire de développer un cancer du sein et de l’ovaire en mesurant les mutations des gènes BRCA-1 et BRCA-2.

Un test génomique permet d’analyser sur le tissu de votre cancer du sein un ensemble de 21 gènes qui expriment son « comportement ». Il permet de prédire le bénéfice de la chimiothérapie ainsi que le risque d’une possible récidive du cancer.

Docteur Chevallier, pourriez-vous nous parler des facteurs de risque du cancer du sein, ainsi que du profil de votre patiente récemment diagnostiquée ?

Le cancer du sein est une maladie qui survient plus fréquemment chez les femmes après 50 ans, ce qui explique les campagnes de dépistage recommandées dès cet âge. Néanmoins, il peut toucher des femmes plus jeunes. Parmi les principaux facteurs de risque, on retrouve le surpoids, des antécédents familiaux de cancer du sein, ainsi que des éléments hormonaux comme un début précoce des règles, l’absence de grossesse ou l’absence d’allaitement. Ces facteurs ne déterminent pas à eux seuls le risque, mais ils augmentent la probabilité de développer la maladie.

Concernant ma patiente, il s’agit d’une femme de 46 ans, en bonne santé générale, sans antécédents familiaux de cancer du sein, mais avec quelques facteurs de risque mineurs. Elle a découvert une masse inhabituelle dans son sein, accompagnée d’une légère douleur. Ce signe, bien que courant, n’est pas toujours présent ; d’autres patientes peuvent remarquer un changement de forme ou un écoulement mammaire. Dans son cas, cette découverte l’a poussée à consulter sans attendre.

Quelles sont les premières étapes lorsqu’une patiente soupçonne un cancer du sein ?

La démarche initiale est de consulter un spécialiste, le plus souvent un gynécologue ou un oncologue, qui va procéder à un examen clinique et, si nécessaire, ordonner des examens d’imagerie adaptés à l’âge et au profil de la patiente, comme une mammographie ou une échographie. En cas de détection d’une anomalie, une biopsie sera réalisée pour une analyse approfondie.

Une fois le diagnostic posé, quelles sont les étapes de traitement, et quels sont les intervenants médicaux impliqués ?

Après avoir posé le diagnostic de cancer, la prise en charge est décidée en réunion multidisciplinaire, appelée “tumor board”, où divers spécialistes — radiologue, pathologiste, chirurgien sénologue, oncologue, radiothérapeute, conseiller en génétique, et infirmier spécialisé — se concertent pour élaborer un plan de traitement personnalisé. Ces discussions garantissent une prise en charge optimale et ajustée aux caractéristiques de chaque patiente, notamment lorsqu’elles sont effectuées dans un centre du sein.

En ce qui concerne les séquences de traitement, elles peuvent varier considérablement d’un cas à l’autre. Par exemple, ma patiente a débuté avec une chirurgie primaire, suivie d’un test génomique pour déterminer la nécessité d’une chimiothérapie. Ce test a confirmé l’utilité de la chimiothérapie qui a été administrée avant la radiothérapie, et elle est désormais sous hormonothérapie. D’autres patientes pourraient suivre un protocole différent, comme commencer par une chimiothérapie pour réduire la taille de la tumeur avant la chirurgie. Cette souplesse dans les étapes de traitement permet de personnaliser les soins en fonction des besoins spécifiques de chaque patiente, maximisant ainsi les chances de réussite.

Troubles cognitifs
Récupéré sur : giphy.com

Pouvez-vous expliquer ce qu’est un test génomique et son rôle dans la prise en charge ?

Un test génomique est un examen sophistiqué qui analyse le profil génétique spécifique d’une tumeur, en examinant ses gènes et ses expressions pour évaluer ses caractéristiques propres. Dans le cadre du cancer du sein, ce test permet de déterminer non seulement la nature du cancer, mais aussi son potentiel agressif et sa réponse aux traitements. Par exemple, pour les cancers dits « hormonosensibles » — ceux qui réagissent aux hormones comme les œstrogènes —, ce test aide à évaluer si une chimiothérapie, souvent éprouvante et accompagnée d’effets secondaires, sera véritablement bénéfique ou non. Plus concrètement, en analysant le profil génomique de la tumeur, nous pouvons calculer le risque de récidive sur plusieurs années. Cette précision est capitale, car elle permet d’identifier les patientes qui tireront réellement un bénéfice d’une chimiothérapie. Si le risque de récidive est jugé faible grâce aux données gé- nomiques, il est alors possible d’éviter une chimiothérapie inutile, épargnant à la patiente des traitements lourds qui pourraient impacter sa qualité de vie.

En revanche, si le test montre un risque élevé de récidive, une chimiothérapie peut être recommandée avec plus de certitude, car elle offre des chances de réduire les risques de retour de la maladie. Cette approche personnalisée, rendue possible par la génomique, représente une avancée majeure dans le domaine de l’oncologie. Elle permet de baser les décisions sur des données scientifiques précises, d’offrir un traitement sur mesure, et, en fin de compte, d’améliorer le pronostic et la qualité de vie des patientes atteintes de cancer du sein.

Ces tests ont-ils eu une influence dans la décision de traitement pour votre patiente ?

Oui, ils ont été décisifs. Pour des cancers hormonosensibles HER2 négatifs, ils permettent une précision inégalée dans l’évaluation des risques de récidive et des bénéfices potentiels de la chimiothérapie. Grâce aux résultats, nous avons pu opter pour un traitement sur mesure.

La patiente était-elle au courant de l’existence de ces tests ? Quelle a été sa réaction aux résultats ?

Elle était informée et proactive dans sa démarche de soin. Lorsqu’elle a appris qu’une chimiothérapie serait nécessaire, elle a d’abord été déçue, espérant y échapper. Néanmoins, elle a trouvé rassurant de savoir que ce choix était validé par une analyse poussée et adaptée à son cas.

Où en est-elle actuellement dans son parcours de soin ?

Elle poursuit son traitement par hormonothérapie, avec des résultats encourageants. Des effets secondaires, comme des bouffées de chaleur, ont pu être atténués grâce à des approches complémentaires prouvées scientifiquement comme efficaces. Diagnostiquée il y a un an, elle reprend progressivement une vie professionnelle sereine.

Un dernier mot pour nos lectrices et lecteurs ?

Grâce aux centres du sein et aux discussions multidisciplinaires, chaque patiente bénéficie d’un parcours de soins unique et sur mesure. Ces avancées offrent un espoir précieux pour toutes celles qui font face à cette épreuve.

Cet article a été réalisé avec l’aimable soutien d’Exact Sciences International Sàrl
L’indépendance de l’opinion de l’expert a été entièrement respectée

Cet article vous a plu ?
Abonnez-vous à la version papier Salle d’attente pour avoir accès à toutes les informations sur le sujet: témoignages, tests, adresses utiles, infographies et autres.
Alors n’attendez-plus !
CHF39.00
Ou abonnez-vous directement pour 8 éditions !
CHF78.00

Loading

Partagez sur

Facebook

Plus d’articles :

Diabète : Quand la technologie simplifie le quotidien

Vivre avec le diabète, c’est composer chaque jour avec la surveillance de la glycémie et la peur des variations imprévisibles. Grâce aux capteurs de glucose en continu (CGM), les patients peuvent suivre leurs valeurs en temps réel, agir immédiatement et retrouver plus de liberté au quotidien. Combinée à un accompagnement médical adapté, cette technologie redonne confiance, autonomie et qualité de vie, en plaçant le patient au centre de sa prise en charge.

Loading

Lire la suite »

Partie 3 – La salle d’attente : le couloir de l’ombre

Découvrez la fin de l’histoire de Daniela Vaucher. Elle a traversé deux cancers et est aujourd’hui en rémission. Pendant toute la durée de ses traitements, c’est dans la salle d’attente de son oncologue qu’elle a tenu son journal intime — un refuge de mots et d’émotions face à l’inconnu. Dans une série de témoignages à paraître sur plusieurs éditions, elle partage avec nous son parcours, entre doutes, espoir et résilience.

Loading

Lire la suite »

Troubles de la marche et de l’équilibre : les premiers signes de l’ataxie de Friedrich

L’ataxie de Friedreich est une maladie neurologique rare, d’origine génétique, qui touche principalement la coordination des mouvements. Elle est provoquée par une atteinte progressive du système nerveux et du muscle cardiaque. En Suisse, on estime qu’environ 200 personnes sont concernées. Elle touche autant les femmes que les hommes, car elle se transmet de façon autosomique récessive*. Les premiers symptômes apparaissent généralement dans l’enfance ou l’adolescence, avec des troubles de l’équilibre et de la marche.

Loading

Lire la suite »

Instants d’espoir : les techniques modernes dans le traitement des maladies de la rétine

Les maladies rétiniennes exigent une grande précision diagnostique et chirurgicale. Dans ce domaine de l’ophtalmologie, les avancées technologiques des dernières années ont profondément transformé la pratique. Quelles sont ces innovations, comment ont-elles changé la chirurgie, et quel impact ont-elles sur les patients ? Le Professeur Matthias Becker, chef de service et directeur du centre de recherche en ophtalmologie de l’hôpital municipal de Zürich Triemli, nous éclaire dans cet entretien.

Loading

Lire la suite »

De la fatigue au diagnostic : Les HPV ne sont pas une fatalité

Les virus du papillomavirus humain (HPV) sont l’une des infections sexuellement transmissibles les plus courantes au monde, touchant près de 90% des femmes et des hommes au moins une fois dans leur vie. En Suisse, ces virus sont responsables de plus de 99% des cas de cancer du col de l’utérus, avec environ 250 nouveaux diagnostics chaque année chez les femmes, dont 80 décès. Face à ce constat, le dépistage régulier, via des frottis cervicaux, reste crucial.¹ L’OFSP recommande d’effectuer la vaccination contre les HPV dès l’âge de 11 à 14 ans, car la protection est optimale lorsque la vaccination a lieu avant le premier contact sexuel. Le vaccin est toutefois recommandé chez toutes les adolescentes et les jeunes femmes jusqu’à 26 ans.² Ce témoignage de Sophie, 59 ans, illustre l’impact personnel des HPV et plaide pour une prévention partagée impliquant aussi les hommes.

Loading

Lire la suite »