Comprendre le syndrome de Gilles de la Tourette

Le combat d’Hélène contre la polyarthrite rhumatoïde
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Dans le bureau animé de l’une des plus grandes entreprises de la ville, au milieu du cliquetis des claviers et du murmure des discussions professionnelles, nous rencontrons Claire, une directrice des ressources humaines chevronnée au sourire chaleureux. À 55 ans, Claire a réalisé une belle carrière mais c’est son parcours personnel qui nous amène ici aujourd’hui. Dans cet entretien, Claire nous explique comment sa vie familiale a été marquée par la maladie de son fils Alexandre, atteint du syndrome de Gilles de la Tourette.

Par Adeline Beijns

Qu’est-ce que le syndrome de Gilles de la Tourette ?

C’est un trouble neurologique souvent mal compris. Il apparaît généralement dans l’enfance, vers l’âge de 8 ans, comme ce fut le cas pour Alexandre. Dans 70% des cas, il s’agit de garçons. Il se caractérise par des mouvements involontaires et des vocalisations, appelés tics. Ces derniers peuvent être moteurs, comme cligner des yeux ou hausser les épaules, ou vocaux, comme des raclements de gorge, des reniflements, des grognements ou, dans certains cas, des paroles involontaires et en particulier des gros mots, ce qu’on appelle la coprolalie.

On pense souvent à tort qu’il implique nécessairement de jurer ou de dire des choses inappropriées, mais il s’agit en fait d’un symptôme rare qui ne touche qu’une minorité de personnes atteintes. Hormis cela, environ 95% des patients souffrent également d’hyperactivité et de trouble de l’attention. Le fait qu’ils se révèlent particulièrement colériques et intolérants à toute frustration rend tout sociabilisation assez difficile. Il est important de comprendre que cette maladie varie considérablement d’une personne à l’autre en termes de type et de gravité des tics.

En a-t-on identifié les causes ?

Bien que des progrès significatifs aient été réalisés dans la compréhension du syndrome, ses causes exactes restent insaisissables. Selon les dernières recherches, la maladie est probablement le résultat d’une interaction complexe entre des facteurs génétiques, environnementaux et neurobiologiques. Les études en cours continuent d’éclairer ces aspects, afin de mieux en cerner les causes et les mécanismes.

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Comment vous êtes-vous aperçue que votre fils en souffrait ?

Cette prise de conscience s’est faite graduellement, en observant des changements dans le comportement d’Alexandre. Au début, j’ai remarqué des choses simples qui ne semblaient pas inquiétantes en soi. Il a commencé à ramener sa main vers son visage toutes les deux secondes et à se racler la gorge. Au début, j’ai pensé que c’était passager mais avec le temps, ces comportements sont devenus plus prononcés et plus fréquents.

Il y a aussi eu les tics vocaux. Alexandre a commencé à faire des bruits de reniflement et, finalement, il a fait de la coprolalie, ce qui a été le plus difficile à comprendre et à gérer pour nous. Alexandre est devenu plus gêné, surtout en présence de ses camarades. Il y a eu des moments de frustration et d’embarras dont nous avons été les témoins, ce qui nous a brisé le cœur. Ce qui nous a vraiment fait comprendre qu’il ne s’agissait pas seulement de manies ou d’habitudes, c’est la nature involontaire de ces actions. Il ne pouvait pas les contrôler, quels que soient ses efforts.

Comment se déroule la pose du diagnostic ?

Le diagnostic implique une évaluation minutieuse des symptômes, des antécédents médicaux et, parfois, l’exclusion d’autres affections susceptibles de provoquer des symptômes similaires. Le diagnostic est essentiellement clinique, basé sur l’observation et l’identification de tics caractéristiques, qui doivent être présents depuis au moins un an. Les tics associés à la maladie peuvent varier en fréquence, en type et en gravité. Ils sont souvent plus prononcés pendant les périodes d’excitation ou de stress et peuvent être moins perceptibles lors d’activités concentrées ou de relaxation.

Quel a été son impact sur votre quotidien ?

Ses répercussions ont été importantes et multiples. Au début, le plus grand défi a été de comprendre l’imprévisibilité de ses tics et de s’y adapter. Nous avons dû apprendre à anticiper et à gérer les situations qui pouvaient être stressantes ou embarrassantes pour lui, ce qui impliquait parfois de modifier les habitudes familiales.

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En tant que parent, il y a aussi l’aspect émotionnel. J’ai dû développer un plus grand sens de la patience et de l’empathie, non seulement pour Alexandre, mais aussi pour les personnes qui ne comprennent peut-être pas sa maladie. Sensibiliser les autres à cette maladie est devenu une partie de notre vie, surtout dans les situations où ses tics étaient mal compris, c’est-à-dire essentiellement à l’école.

Comment va Alexandre aujourd’hui ?

Il a beaucoup de chance car il fait partie des 3% de patients dont le syndrome peut disparaître à l’âge adulte. Cela fait deux ans qu’il ne suit plus de traitements et il mène la vie d’un jeune homme de 20 ans même si nous sommes bien conscients que la maladie reste latente et que certains tics peuvent se manifester en cas de stress.

Qu’aimeriez-vous dire aux personnes à qui on annonce ce diagnostic ?

Le pose du diagnostic est extrêmement difficile à vivre tant pour la personne concernée que pour sa famille. Il y aura des moments de frustration, de confusion et de découragement. Vous devrez vous frayer un chemin dans un monde qui comprend et interprète mal cette maladie. Il est aussi crucial de comprendre qu’il ne s’agit pas d’un trouble psychiatrique mais d’un trouble neurologique. Cette distinction est importante parce qu’elle influe sur la façon dont vous abordez la maladie et dont vous défendez vos intérêts ou ceux de votre proche.

Malgré les difficultés, n’oubliez pas que le fait d’être atteint par cette maladie ne signifie pas que vous êtes handicapé. De nombreux patients mènent une vie riche et réussie. Il s’agit d’un handicap en ce sens qu’il présente des défis auxquels d’autres personnes ne sont pas confrontées, mais il ne définit pas vos capacités ou votre potentiel. Enfin, la patience et la tolérance seront vos alliées. Vous en aurez besoin en abondance, non seulement pour faire face au syndrome lui-même, mais aussi pour informer les autres.

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