Le rétinoblastome, un cancer pédiatrique rare

Récupéré sur : giphy.com

Touchant environ 1 sur 17 000 naissances, le rétinoblastome est un cancer rare de l’œil qui se développe généralement avant l’âge de 3 ans. Des symptômes relativement évidents et un diagnostic simple à établir augmentent la possibilité d’une détection précoce et donc d’une prise en charge rapide de ce cancer. Entretien réalisé auprès de la Docteure Christina Stathopoulos, Médecin associée et Responsable de l’unité d’Oncologie oculaire pédiatrique de l’Hôpital ophtalmique Jules-Gonin, Maître d’enseignement et de recherche à l’Université de Lausanne.

Adeline Beijns

Qu’est-ce que le rétinoblastome et qui touche-t-il ?

Le rétinoblastome est une tumeur cancéreuse qui se développe à partir des cellules immatures de la rétine, une membrane fine tapissant le fond de l’œil destinée à recevoir les impressions lumineuses qui délivrent la vision. La tumeur se développe chez les enfants avant l’âge de 4 ans mais les symptômes et le diagnostic peuvent être plus tardifs. Dans la majorité des cas, la prédisposition à cette maladie est due à une anomalie sur le gène RB1, un gène impliqué dans le contrôle de la division cellulaire.

On distingue deux formes de la maladie. Dans la forme non héréditaire (60% des cas), la mutation se fait après la conception durant la réplication cellulaire et seul un œil est touché. Dans la forme héréditaire (40% des cas) par contre, la mutation se fait dans les gamètes (spermatozoïde ou ovule) et la maladie se développe généralement dans les deux yeux. Les patients avec une forme héréditaire sont également plus à risque que le reste de la population de développer d’autres types de cancers tout au long de leur vie.

Quels en sont les premiers symptômes ?

Le signe le plus fréquent du rétinoblastome est la leucocorie, un reflet blanchâtre dans la pupille provoqué par la tumeur, au lieu du reflet noir d’un œil sain en éclairage normal ou rouge lors d’un éclairage direct comme sur une photo prise avec flash. Le deuxième signe caractéristique est le strabisme. Plus rarement, la maladie va se manifester par d’autres symptômes comme une baisse de la vision, une rougeur ou un changement de couleur de l’iris. Il est essentiel de rester attentif à tout signe de troubles visuels ou de modification de l’apparence de l’œil, en particulier chez les jeunes enfants, et de consulter un médecin si vous constatez l’un de ces symptômes.

Récupéré sur : giphy.com

Quelles sont les conséquences de la survenance de cette tumeur sur la qualité de vie du patient ?

Le diagnostic de rétinoblastome peut avoir un impact important affectant non seulement l’enfant atteint mais également son entourage. Le traitement conservateur de la maladie nécessite des anesthésies générales régulières (initialement en moyenne une fois par mois durant les 2 ans suivant le diagnostic) ce qui peut être stressant et éprouvant particulièrement pour les parents. En termes de santé physique, le rétinoblastome ou les complications liées au traitement peuvent entraîner une perte ou une déficience de la vision. L’aide des professionnels de la santé mais aussi des organisations de soutien dédiées à la maladie est essentielle pour minimiser l’impact à long terme de la maladie sur la vie d’un patient.

Est-il facile d’établir un diagnostic ?

Une leucocorie peut être difficile à détecter par le pédiatre lors d’un examen de routine, car elle dépend de la taille et de la localisation de tumeur. Au contraire, le diagnostic du rétinoblastome est en général aisé pour l’ophtalmologue après un examen simple et indolore du fond d’œil qui peut se faire en consultation car la maladie présente des signes cliniques caractéristiques.

Nous recommandons que toute suspicion de leucocorie ou strabisme soit vue rapidement (dans les 7 jours) par un(e) ophtalmologue. En cas de doute, l’enfant est habituellement référé dans un hôpital universitaire pour des examens complémentaires ou à l’Hôpital ophtalmique Jules Gonin de Lausanne pour un deuxième avis et une prise en charge spécialisée.

Récupéré sur : giphy.com

Peut-on aujourd’hui traiter ce cancer ?

Non traitée, la tumeur va grandir et détruire progressivement la vision, mais aussi se propager en dehors de l’œil, engageant alors le pronostic vital. Diagnostiquée à temps, la maladie a cependant d’excellente chance de guérison avec un taux de survie qui avoisine les 98% dans les pays développés. Parmi les armes disponibles pour combattre la maladie, on compte la chimiothérapie (intraveineuse, intra-artérielle et intraoculaire), les traitements focaux (comme le laser ou la cryocoagulation) et les plaques radioactives. L’énucléation (retrait de l’œil) est parfois nécessaire pour éviter la propagation des cellules cancéreuses.

Le traitement du rétinoblastome est complexe et multidisciplinaire impliquant plusieurs équipes (onco-ophtalmologues pédiatres, onco-pédiatres, neuroradiologues, neuroradiologues interventionnels, anesthésistes pédiatres, pathologue, orthoptistes, infirmières spécialisées etc..). En Suisse, tous les patients atteints de rétinoblastome sont suivis à l’Hôpital ophtalmique Jules Gonin et au CHUV, centres qui partagent le label MHS (médecine hautement spécialisée) pour la prise en charge de la maladie.

Le mot de la fin chère Docteure Stathopoulos?

De nos jours, en Europe et dans les pays dit développés, la plupart des enfants sont diagnostiqués avant que leur vie ne soit en danger. De plus, grâce aux avancées diagnostiques et thérapeutiques effectuées ces 15 dernières années, les chances de sauvegarde oculaire, souvent avec une vision utile, ont considérablement augmentée, même dans les formes avancées de la maladie et cela dans un délai plus court et avec moins d’effets indésirables qu’auparavant. Finalement, les traitements sont habituellement administrés en ambulatoire et la grande majorité des enfants vont pouvoir suivre pendant ou après la maladie une scolarité normale.

Cet article vous a plu ?
Abonnez-vous à la version papier Salle d’attente pour avoir accès à toutes les informations sur le sujet: témoignages, tests, adresses utiles, infographies et autres.
Alors n’attendez-plus !
CHF39.00

Loading

Partagez sur

Facebook

Plus d’articles :

Diabète : Quand la technologie simplifie le quotidien

Vivre avec le diabète, c’est composer chaque jour avec la surveillance de la glycémie et la peur des variations imprévisibles. Grâce aux capteurs de glucose en continu (CGM), les patients peuvent suivre leurs valeurs en temps réel, agir immédiatement et retrouver plus de liberté au quotidien. Combinée à un accompagnement médical adapté, cette technologie redonne confiance, autonomie et qualité de vie, en plaçant le patient au centre de sa prise en charge.

Loading

Lire la suite »

Partie 3 – La salle d’attente : le couloir de l’ombre

Découvrez la fin de l’histoire de Daniela Vaucher. Elle a traversé deux cancers et est aujourd’hui en rémission. Pendant toute la durée de ses traitements, c’est dans la salle d’attente de son oncologue qu’elle a tenu son journal intime — un refuge de mots et d’émotions face à l’inconnu. Dans une série de témoignages à paraître sur plusieurs éditions, elle partage avec nous son parcours, entre doutes, espoir et résilience.

Loading

Lire la suite »

Troubles de la marche et de l’équilibre : les premiers signes de l’ataxie de Friedrich

L’ataxie de Friedreich est une maladie neurologique rare, d’origine génétique, qui touche principalement la coordination des mouvements. Elle est provoquée par une atteinte progressive du système nerveux et du muscle cardiaque. En Suisse, on estime qu’environ 200 personnes sont concernées. Elle touche autant les femmes que les hommes, car elle se transmet de façon autosomique récessive*. Les premiers symptômes apparaissent généralement dans l’enfance ou l’adolescence, avec des troubles de l’équilibre et de la marche.

Loading

Lire la suite »

Instants d’espoir : les techniques modernes dans le traitement des maladies de la rétine

Les maladies rétiniennes exigent une grande précision diagnostique et chirurgicale. Dans ce domaine de l’ophtalmologie, les avancées technologiques des dernières années ont profondément transformé la pratique. Quelles sont ces innovations, comment ont-elles changé la chirurgie, et quel impact ont-elles sur les patients ? Le Professeur Matthias Becker, chef de service et directeur du centre de recherche en ophtalmologie de l’hôpital municipal de Zürich Triemli, nous éclaire dans cet entretien.

Loading

Lire la suite »

De la fatigue au diagnostic : Les HPV ne sont pas une fatalité

Les virus du papillomavirus humain (HPV) sont l’une des infections sexuellement transmissibles les plus courantes au monde, touchant près de 90% des femmes et des hommes au moins une fois dans leur vie. En Suisse, ces virus sont responsables de plus de 99% des cas de cancer du col de l’utérus, avec environ 250 nouveaux diagnostics chaque année chez les femmes, dont 80 décès. Face à ce constat, le dépistage régulier, via des frottis cervicaux, reste crucial.¹ L’OFSP recommande d’effectuer la vaccination contre les HPV dès l’âge de 11 à 14 ans, car la protection est optimale lorsque la vaccination a lieu avant le premier contact sexuel. Le vaccin est toutefois recommandé chez toutes les adolescentes et les jeunes femmes jusqu’à 26 ans.² Ce témoignage de Sophie, 59 ans, illustre l’impact personnel des HPV et plaide pour une prévention partagée impliquant aussi les hommes.

Loading

Lire la suite »