Incontinence : stop au tabou !

Véritable problème de santé publique, l’incontinence urinaire et anale touche jusqu’à une femme sur deux à partir de 60 ans. Les jeunes n’en sont pas moins épargnées et éprouvent une véritable souffrance lorsqu’elles sont concernées. Des solutions existent et il est temps d’en parler. Entretien réalisé auprès du Dr. med. Ali Samim, FMH Gynécologie-obstétrique et gynécologie opératoire à Fribourg.

Par Adeline Beijns

Qu’est-ce que l’incontinence urinaire et anale chez les femmes ? 

L’incontinence urinaire est une pathologie dans laquelle une personne perd ses urines de façon involontaire tandis que l’incontinence anale est la situation dans laquelle une personne connaît des pertes incontrôlées de selles ou de gaz.

L’incontinence urinaire chez la femme présente plusieurs formes dont les plus fréquentes sont: l’incontinence à l’effort (50% des cas), l’incontinence par impériosité (c’est ce qu’on appelle l’incontinence d’urgence qui concerne 30% des patientes) et l’incontinence mixte. On parle d’incontinence urinaire d’effort lorsque la fuite d’urine est causée par la pression exercée sur la vessie lors d’activités physiques telles que l’éternuement, la toux ou l’activité physique. L’incontinence par impériosité est celle que l’on éprouve lorsque l’envie d’uriner est irrépressible et est accompagnée de pertes d’urines sur le chemin des toilettes. Enfin, l’incontinence mixte associe l’incontinence d’effort et l’incontinence par impériosité.

Rencontrez-vous beaucoup de patientes qui en souffrent ? Quel est leur profil ? 

Il s’agit hélas d’un véritable fléau qui touche toutes les catégories d’âge. Même si l’âge est un facteur aggravant, les jeunes femmes sont aussi touchées. De manière générale, on estime qu’entre 25 et 45% de la gente féminine serait concernée. Pour être plus précis, l’incontinence toucherait 20 à 30% des femmes de moins de 40 ans, 30 à 40% des femmes entre 40 et 60 ans et jusqu’à une femme sur deux de plus de 60 ans.

Quels sont les signes qui devraient alerter ? 

Il s’agit d’une perte incontrôlée et involontaire d’urine, de selles ou de gaz. Se rendre souvent aux toilettes et en particulier la nuit peut aussi être le signe d’une irritabilité et d’une instabilité de la vessie. 

Chez les femmes, l’incontinence urinaire et fécale peut être causée par divers facteurs, notamment la grossesse et l’accouchement en particulier lorsque ce dernier a été difficile au point de fragiliser les muscles du plancher pelvien. L’âge, l’obésité, le tabac ainsi que la pratique de sport dits à impacts comme la course à pied sont aussi des facteurs de risque aggravants. Enfin, il y a parfois un aspect héréditaire chez les femmes qui ont des tissus conjonctifs laxes.

L’incontinence fécale chez les femmes peut également être causée par une série de facteurs, notamment des lésions des muscles ou des nerfs qui contrôlent l’appareil sphinctérien anal mais aussi à la suite de certaines chirurgies digestives. 

A qui devraient-elles s’adresser pour trouver de l’aide ?

Lors de leur contrôle gynécologique annuel les patientes ont la possibilité de parler de leurs troubles urinaire ou fécal. Le gynécologue reste un interlocuteur de choix pour discuter de ces sujets tabous. 

Néanmoins les médecins de premier recours, que sont les généralistes, devraient aussi davantage sensibiliser les patientes sur ce sujet et les diriger vers les spécialistes concernés. 

On peut imaginer que l’impact sur la qualité de vie des femmes doit être considérable ? 

Les conséquences d’une incontinence peuvent être dramatiques en affectant leur bien-être physique, émotionnel, social et financier. 

L’incontinence urinaire et fécale peut causer de l’embarras, de la honte et une perte d’estime de soi, ce qui peut entraîner de l’anxiété, une dépression voire un isolement social. Elle peut également affecter les relations intimes et mener à des dysfonctions sexuelles. Elle peut également amener les femmes à limiter leurs activités physiques ce qui peut entraîner un mode de vie plus sédentaire, susceptible d’affecter davantage leur santé physique et émotionnelle.

Enfin, il ne faut pas non plus oublier que les protections ont un coût et que l’incontinence peut aussi plonger les patientes dans une détresse financière.

Quels sont les premières solutions qui s’offrent aux femmes ? 

Les traitements dépendent du type, de la gravité et de la cause sous-jacente de l’incontinence. Dans le cas d’une incontinence d’effort liée à un affaiblissement des muscles pelviens, la première ligne de traitement consiste en une rééducation périnéale pratiquée par des physiothérapeutes spécialisés. Cette thérapie peut aider à améliorer la force et la coordination musculaires, à accroître le contrôle de la vessie ou des intestins et à réduire les fuites. Le physiothérapeute peut parfois recommander l’utilisation d’un pessaire pour aider à soutenir les organes pelviens et améliorer le soutien musculaire. Si ces thérapies ne devaient pas être concluantes, l’alternative chirurgicale peut être proposée. La bandelette sous urétral ou l’injection d’un agent comblant sont les plus utilisées.

Dans le cas d’une incontinence d’urgence, des médicaments peuvent être prescrits pour aider à calmer l’hyperactivité vésicale. En cas d’échec, les options d’injection de toxine botulique ou la neuromodulation sacrée sont évoquées.

A quel moment intervient la neuromodulation sacrée et quel est son impact sur la qualité de vie ? 

La neuromodulation est une technique qui a révolutionné le traitement de l’incontinence urinaire d’urgence et/ou anale avec un taux de réussite pouvant atteindre 80%. D’après ma propre expérience, ce traitement améliore significativement le quotidien des femmes et est relativement simple à implémenter. 

La procédure implique l’implantation d’une électrode, près du nerf sacré, qui contrôle la vessie et les intestins. Elle est alimentée par une pile, qui si le test est favorable, sera implantée sous la peau.

L’incontinence urinaire d’urgence est une composante plus complexe que celle d’effort. Son origine peut être neurogène et les traitements sont donc bien moins efficace que ceux contre l’effort.

Dans ce contexte, la neuromodulation a une efficacité remarquable par rapport aux autres outils thérapeutiques.

Cet article a été réalisé avec l’aimable soutien de Medtronic (Suisse) SA
L’indépendance de l’opinion du patient a été entièrement respectée

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