Le quotidien avec la drépanocytose

La drépanocytose est une maladie encore méconnue du grand public, bien que ses effets puissent être dévastateurs pour ceux qui en souffrent. C’est lors d’une rencontre par un samedi ensoleillé dans un parc de Lausanne que j’ai eu l’occasion d’écouter l’histoire de Loren, une écrivaine de 40 ans, mère d’un petit garçon de 9 mois. Loren m’a raconté son parcours marqué par la douleur et la détermination face à une maladie qui a profondément affecté sa vie.  

Par Adeline Beijns

Une découverte à la naissance

Les parents de Loren ont appris dès sa naissance qu’elle était atteinte de drépanocytose. Née aux États-Unis, elle a bénéficié du dépistage systématique qui y est pratiqué. Ses parents, bien que désemparés par ce diagnostic inconnu, ont fait de leur mieux pour lui offrir une enfance normale. Pendant les dix premières années de sa vie, Loren a vécu comme tous les autres enfants, ignorant les difficultés qui allaient bientôt surgir.

Une première crise traumatique

À l’âge de 10 ans, Loren a vécu sa première grande crise. « C’était un jour de septembre », se souvient-elle, « et l’école n’avait pas encore repris. » Ce jour-là, chez une amie, après avoir passé du temps dans la piscine, elle a ressenti un froid intense. Elle s’est dirigée seule vers la salle de bain pour se changer et s’est effondrée quelques minutes plus tard. Cette expérience, où son corps a été envahi par une douleur insupportable et une paralysie glaciale, a été un choc traumatisant pour elle et ses proches. Cet événement marqua le début de sa conscience aiguë de la maladie.

Une adolescence sous surveillance

Malgré cet épisode douloureux, Loren a poursuivi ses études brillamment, mais son adolescence a été marquée par un manque de suivi médical. « Je n’ai jamais consulté un hématologue avant l’âge adulte, » confie-t-elle. Ses parents, peu informés, se contentaient de l’emmener chez le pédiatre, sans comprendre la gravité de certains symptômes. Lors de sa première crise à 10 ans, elle a dû ramper pour monter et descendre les escaliers la nuit pour se rendre aux toilettes, tant son corps souffrait. « C’était comme si mes os étaient pris dans un étau, serrés et broyés, » se souvient-elle. « La douleur était un supplice atroce qui me paralysait, m’empêchant de bouger ou de respirer. »

Les défis de l’âge adulte

À 30 ans, alors qu’elle menait une carrière professionnelle brillante mais exigeante, Loren a subi une nouvelle série de crises. Le stress accumulé par des journées de travail de 14 heures a réactivé les symptômes de la drépanocytose. L’une des crises les plus marquantes a été précédée par une paralysie de Bell, qui a immobilisé une partie de son visage. « Je pensais faire un AVC », se rappelle-t-elle, encore émue. Les urgences se sont multipliées, mais Loren a souvent dû faire face à l’incompréhension de certains médecins qui minimisaient ses douleurs et refusaient de la soigner.

Une vie réinventée pour la maternité

Récupéré sur : giphy.com

Loren a toujours voulu être mère, mais sa grossesse a été marquée par une profonde incertitude et un stress intense, en grande partie dus au manque de certitude sur la manière de mener une grossesse en bonne santé avec la drépanocytose. En effet, les risques accrus de mortalité maternelle et de complications pour le bébé, tels que les fausses couches ou la prématurité, ont rendu cette période particulièrement éprouvante.

Les défis ne s’arrêtant pas là, Loren a dû recevoir en urgence des injections d’anticorps pour protéger son bébé, tout en faisant face à une augmentation des infections pendant sa grossesse. « Il existe très peu de ressources claires pour les femmes enceintes atteintes de drépanocytose, et cela ajoute à l’angoisse d’une expérience déjà difficile, » explique-t-elle.

La difficulté d’une maladie invisible

Loren fait face à une double stigmatisation : vivre avec une maladie invisible, souvent incomprise, et se sentir parfois illégitime par rapport à ceux atteints de formes plus sévères de drépanocytose. Elle a également découvert tardivement que la maladie pouvait affecter ses organes, comme ses yeux, lorsque ses problèmes de vue se sont aggravés et auraient pu mener à la cécité. Malgré ces épreuves, Loren a réussi à bâtir une carrière, fonder une famille et trouver un équilibre précieux. Elle espère que la drépanocytose sera mieux connue, pour que d’autres ne se sentent plus seuls face à cette maladie.

Témoignage du médecin ici

Cet article a été réalisé avec l’aimable soutien de Vertex Pharmaceuticals (CH) GmbH

Cet article vous a plu ?
Abonnez-vous à la version papier Salle d’attente pour avoir accès à toutes les informations sur le sujet: témoignages, tests, adresses utiles, infographies et autres.
Alors n’attendez-plus !
CHF39.00
Ou abonnez-vous directement pour 8 éditions !
CHF78.00

Loading

Partagez sur

Facebook

Plus d’articles :

Prisonnière du bien-être : témoignage d’une addiction invisible

Lorsque la quête du bien-être vire à l’obsession, l’équilibre se brise. Aujourd’hui, de nouvelles formes d’addictions émergent, souvent masquées derrière des comportements perçus comme vertueux : le sport et l’alimentation saine. La bigorexie, addiction à l’activité physique, et l’orthorexie, obsession de manger sainement, peuvent devenir une prison invisible. Jeanne Spachat, auteure du livre « La nouvelle vie d’un caméléon », a connu ces dérives. Elle témoigne aujourd’hui de ce combat intérieur vers un équilibre retrouvé.

Loading

Lire la suite »

Rhinosinusite chronique : ne laissez pas les polypes nasaux prendre le dessus

La rhinosinusite chronique sévère avec polypes nasaux est une affection qui impacte considérablement la qualité de vie des patients. Elle se caractérise par une inflammation persistante des muqueuses nasales et sinusiennes, accompagnée de formations polypeuses qui peuvent gêner la respiration, diminuer l’odorat et entraîner des infections récurrentes. Pour mieux comprendre cette maladie ainsi que les approches thérapeutiques actuelles, nous avons interrogé le Professeur Matteo Trimarchi, expert en oto-rhino-laryngologie à l’Université de la Suisse Italienne et chef du service d’ORL à l’Ente Ospedaliero Cantonale de Lugano.

Loading

Lire la suite »

Chirurgie de l’épaule : au-delà du geste technique

L’épaule, articulation complexe essentielle à la mobilité quotidienne, peut être affectée par divers troubles tels que l’arthrose, les lésions tendineuses ou les traumatismes. La chirurgie de l’épaule s’est considérablement perfectionnée ces dernières années, mais reste un acte délicat, notamment chez les patients âgés ou très actifs. Pour explorer les avancées, les défis actuels et les bonnes pratiques en chirurgie orthopédique de l’épaule, nous avons rencontré la Dre. Cristina Bassi, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et traumatologie de l’appareil locomoteur à la Clinique de Genolier.

Loading

Lire la suite »

Fibrose pulmonaire idiopathique : d’une toux persistante à une greffe des poumons

La fibrose pulmonaire idiopathique (FPI) est une maladie pulmonaire grave dont les causes restent encore largement inconnues. Elle provoque une cicatrisation progressive et irréversible du tissu pulmonaire, réduisant ainsi l’oxygénation du sang. Malheureusement, son diagnostic intervient souvent tardivement, car les symptômes précoces peuvent facilement être confondus avec une simple toux ou un rhume persistant. À travers le parcours d’Urbain Ndecky, un homme de 57 ans au courage remarquable, découvrez comment une simple toux s’est transformée en un combat quotidien pour la vie.

Loading

Lire la suite »

Retrouver son souffle grâce à la réhabilitation pulmonaire

Souffle court, essoufflement au moindre effort, isolement social : voilà les difficultés auxquelles doivent faire face de nombreuses personnes souffrant de maladies respiratoires chroniques. La réhabilitation pulmonaire offre une réponse adaptée et multidisciplinaire permettant non seulement d’améliorer le souffle mais aussi de diminuer le handicap et favoriser la resocialisation des patients. Pour mieux comprendre les spécificités de cette thérapie, nous avons rencontré le Professeur Jean-Paul Janssens, pneumologue et responsable du programme de réhabilitation pulmonaire ambulatoire à l’Hôpital de La Tour et Nicolas Beau, physiothérapeute et co-responsable du même programme.

Loading

Lire la suite »

Le secret des centenaires

Chers lecteurs et lectrices, je me considère comme une véritable ambassadrice d’une belle cause : celle de la recherche sur la longévité. Pourquoi ? Parce qu’elle nous offre des clés pour vivre en meilleure santé et plus longtemps. Mais parlons chiffres : quel est l’objectif des chercheurs ? Viser 120 ans, et ce, en pleine forme ! Certains vont même jusqu’à envisager 130 voire 150 ans. Des projections ambitieuses, peut-être trop. Pour ma génération et probablement les suivantes, ces chiffres relèvent encore de la science-fiction. Mais vivre 90 ans en bonne santé ou même atteindre les 100 ans semble de plus en plus à notre portée.

Loading

Lire la suite »