L’incontinence, c’est du passé !

Outre l’inconfort que l’incontinence, urinaire ou fécale, peut provoquer, les personnes qui en souffrent s’isolent socialement et sont plus susceptibles de souffrir de dépression. Pourtant, quel que soit l’âge du patient, une prise en charge thérapeutique peut apporter une amélioration significative de la qualité de vie. La neuromodulation sacrée se révèle particulièrement efficace. Entretien réalise auprès du Docteur Nuno Grilo, médecin urologue a Lausanne, spécialiste de l’incontinence et en neuro-urologie.

Par Adeline Beijns

Qu’est-ce que l’incontinence ? A quoi est-elle due ?

Lorsque l’on évoque l’incontinence, on pense immédiatement à l’incontinence urinaire qui est la perte involontaire d’une quantité d’urine, que celle-ci soit petite ou abondante. On distingue l’incontinence urinaire d’effort, due à une augmentation de la pression abdominale suite à un effort tel qu’un éternuement, une toux ou un effort physique, et l’incontinence urinaire d’urgence qui est la perte d’urine après un besoin irrépressible d’uriner. L’incontinence urinaire n’est cependant pas la seule car l’incontinence fécale, généralement plus difficile à vivre et à gérer, existe également. Les deux types d’incontinence sont souvent dues non pas à un seul facteur mais plutôt à une combinaison de facteurs. Bien que l’âge soit un facteur de risque, les accouchements traumatiques ayant entraîné une déchirure musculaire ou ligamentaire comptent parmi les causes les plus souvent retenues.

Existe-t-il un profil type de patient ?

Même si la prévalence de l’incontinence augmente avec l’âge, elle peut toucher aussi bien les enfants que les hommes et les femmes d’âge mûr. Dans le cas des enfants, elle sera souvent due à une maladie neurologique ou une malformation de naissance. Les femmes ayant eu plusieurs accouchements par voie basse d’enfants ayant un poids élevé, constituent cependant la majorité des patients. Quant aux facteurs de risque, les principaux sont l’obésité, le diabète, certaines maladies neurologiques ainsi que les chirurgies pelviennes dont l’ablation de la prostate.

Hormis les problèmes physiques, à quels autres problèmes ces patients doivent-ils faire face ?

Les contraintes liées à l’incontinence sont telles que les personnes qui en sont atteintes ont tendance à s’isoler socialement et à plus souffrir de dépression. En effet, sortir de chez elles peut se révéler difficile car elles doivent repérer les toilettes, prévoir des habits de rechange et porter des protections. À cela, s’ajoute la peur de sentir mauvais. La conséquence pour les personnes âgées, est une vie encore plus sédentaire qui contribue au développement d’autres pathologies. C’est donc un cercle vicieux.

Comment traite-t-on l’incontinence ?

Le traitement dépendra bien sûr du type d’incontinence mais de manière générale, on commence toujours par un traitement conservateur qui implique un changement de comportement et diététique c’est-à-dire augmenter l’hydratation et améliorer tant le transit intestinal que les allées aux toilettes. La seconde étape est la physiothérapie visant à renforcer le plancher pelvien et le périnée. Si ces deux mesures ne suffisent pas, une chirurgie est généralement recommandée pour l’incontinence urinaire d’effort et fécale.

En ce qui concerne l’incontinence urinaire d’urgence, les traitements sont d’abord également conservateurs avant de recommander la prise de médicaments oraux pour contrôler la vessie hyperactive. En fonction du patient, d’autres solutions peuvent être envisagées et notamment la neuromodulation sacrée. Cette technique est indiquée en cas d’incontinence urinaire et fécale et n’est considérée qu’en cas d’échec du traitement conservateur ou si le malade ne supporte pas bien la médication. Elle consiste en deux étapes.

D’abord l’implantation d’une électrode dans le foramen sacré (c’est-à-dire au-dessus du coccyx, dans le bas du dos) sous anesthésie locale et la connexion de celle-ci à un petit stimulateur temporaire qui est porté sur une ceinture. Les nerfs sacrés assurent en effet le contrôle des systèmes urinaires et fécaux ainsi que des muscles du plancher pelvien.

Ensuite, après une phase de test de 2 à 3 semaines, si le patient rapporte une amélioration des symptômes de plus de 50%, le stimulateur définitif est implanté sous la peau au niveau du haut de la fesse. Le système est composé de trois éléments : un neurostimulateur implantable semblable à un stimulateur cardiaque, une électrode qui véhicule les impulsions électriques jusqu’aux nerfs contrôlant le plancher pelvien et notamment l’intestin et la vessie et une télécommande patiente qui permet de régler l’intensité de la stimulation et d’activer et de désactiver le système.

Les résultats sont-ils observables rapidement ?

Oui, ils sont pratiquement immédiats en cas de chirurgie et s’améliorent encore au cours des semaines qui suivent.

Qu’aimeriez-vous dire aux personnes qui en souffrent ?

Il est important qu’elles ne souffrent pas en silence car il s’agit d’une pathologie comme une autre même si le sujet est encore malheureusement tabou. Des études ont montré que les personnes attendent généralement 7 ans avant de consulter un médecin, c’est beaucoup trop long. De nombreuses solutions existent pour traiter l’incontinence et améliorer la qualité de vie des patients. Il ne faut donc pas que ces personnes hésitent à obtenir une aide médicale et il ne faut pas s’arrêter au premier traitement proposé.

En cas de doute, n’hésitez pas à consulter votre médecin !

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