Ma vie secrète

Photo by Peter Forster on Unsplash

Parfois la vie nous apporte un concentré de bonheur mais aussi de malheur. Dans ces moments-là, chacun vit son expérience à sa façon. C’est là aussi que certains trouvent la force de marcher droit, sans se plaindre, sans faire de bruit. L’histoire de Jany en est la preuve. Rencontre. 

Par Ana Popov

Tout a commencé par une extinction de voix en 1986 qui a duré un certain temps. On m’a découvert des polypes sur les cordes vocales. Mon médecin les a rapidement tous enlevés. En 1989, mêmes symptômes. Cette fois-ci, après une biopsie, le diagnostic était clair: cancer des cordes vocales. Une intervention chirurgicale était prévue dans les jours à venir.

Camoufler la chimiothérapie

Je ne me souviens pas avoir été catastrophée ou anéantie. Je me souviens qu’après l’annonce, je suis allée manger une bonne côte de bœuf. Oh, ça, je m’en souviens ! Il faut dire que c’était une période de ma vie compliquée. Beaucoup de soucis à la maison. Mon époux était licencié et sans emploi depuis un an et demi, les notes de ma fille âgée de 12 ans chutaient. Notre situation était difficile, c’est pourquoi j’ai décidé de ne rien dire. Sauf à ma responsable au travail, car j’avais besoin d’un aménagement d’horaires pour faire ma chimiothérapie.

Eh oui! Quinze séances de chimio à effectuer à 30 km de chez moi. Personne ne s’est douté de rien. J’avoue que ça n’a pas été facile tous les jours. Je faisais mes séances dans la matinée. Pendant les retours en voiture, je m’arrêtais vomir au bord de la route. Je filais ensuite directement au travail. Une fois arrivée, je me rafraîchissais un peu dans les toilettes, je me brossais les dents et j’étais à nouveau d’attaque.

Ces aménagements m’ont valu les commentaires de collègues. Ils n’étaient pas au courant de ma maladie. Eux voyaient seulement les privilèges accordés. J’ai perdu mes beaux cils, mes cheveux. Je camouflais le tout avec une perruque. La fatigue s’était vite installée. Il m’était de plus en plus difficile de faire bonne figure, j’employais quand même toutes mes forces pour tenir le coup.

 » Il m’était de plus en plus difficile de faire bonne figure, j’employais quand même toutes mes forces pour tenir le coup. »

Ne touche pas à mon repas !

J’étais tellement fatiguée que les tâches quotidiennes devenaient un vrai calvaire. Un jour à la maison, j’ai tout déballé. J’ai tout raconté à mon époux et à ma fille. Ma maman l’a su d’une autre façon. Elle avait rencontré par hasard une de mes collègues qui lui a tout simplement demandé si j’étais toujours en chimio. Pauvre maman! Je ne vous dis pas le choc qu’elle a eu. Après les chimios, je ne pouvais rien avaler, rien manger. Mon médecin m’a prescrit des boissons médicales protéinées pour me maintenir et me redonner des forces. Je prenais le soin d’enlever les étiquettes des boissons avant de les ranger au frigo de notre salle de repas au travail. J’avais toujours l’intention de cacher ma maladie. Malheureusement, un jour quelqu’un s’était servi de ma boisson. Dans un élan de colère, j’avais écrit un mot: «Veuillez me rendre mon repas protéiné à usage unique pour les personnes en chimio.» J’ai mis mon nom en évidence sur ce petit message. Voilà comment mes collègues de travail ont découvert que j’étais malade.

Comment vous en êtes- vous sortie de tout cela ?

Le creux de la vague avait assez duré. Mais après les chimios, je me sentais enfin vivante. J’étais toujours fatiguée, mais je savais que j’allais reprendre du poil de la bête. Tout rentrait dans l’ordre à nouveau. Mon époux avait trouvé un emploi stable, ma fille avait retrouvé son sourire et ses bonnes notes à l’école. Je pense que j’avais réagi ainsi pour protéger ma famille de la maladie. Moi, je savais que je m’en sortirais. Ne rien dire et aller de l’avant sans partager mes souffrances. Je suis comme ça, c’est ma nature. Je vois toujours le verre à moitié plein et non à moitié vide.

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