Cette blessure de l’âme

Photo by Jairo Alzate on Unsplash

Si le cancer meurtrit le corps, il peut aussi causer de profondes blessures intérieures. Quelles sont les craintes des patients ? Comment soulager l’esprit pour mieux soutenir son corps ? Trois questions à Docteure Olivia Laurent, médecin spécialiste en psychiatrie et psychothérapie.

Par Thierry Amann

L’annonce du cancer bouleverse des personnes dans leur corps, leur identité et même dans leur place dans la société. Devenir patient, c’est être impliqué dans un processus de soins, c’est voir sa vie rythmée par les examens et les traitements médicaux: cela bouleverse l’équilibre. Des études montrent que 20 à 30% des patients atteints du cancer auront besoin d’un suivi psychologique, car ils vont présenter des difficultés telles que des troubles de l’adaptation. En effet, faire face au cancer c’est devoir s’adapter à un événement très stressant. Chez certaines personnes, cela engendre une dépression, de la tristesse ou encore de l’anxiété. Cela peut se traduire par des troubles du sommeil ou de l’appétit. Tout cela vient s’ajouter aux symptômes de la maladie qui affaiblissent déjà le corps. Les patients sont aussi frappés par de nombreuses préoccupations existentielles: pourquoi ça m’arrive? Pourquoi une telle injustice? Pour les patients en rémission, c’est aussi la peur de la récidive. Souvent, les gens traversent le cancer comme on traverse une crise: ils cherchent à lui donner un sens, à répondre à un certain nombre de questions et ainsi mener un combat intérieur, avec à la clé une possible opportunité de changement.

L’appel à l’aide à un spécialiste psychologue ou psychiatre est-il facile pour les patients ? Ont-ils des réticences ?

Certains patients demandent spontanément de l’aide car ils ont le sentiment de perdre pied et de ne plus pouvoir faire face. Sinon, bien souvent, la demande vient des proches ou des soignants, car ils observent des difficultés psychiques. Parfois, les oncologues eux-mêmes détectent au détour d’une consultation une profonde détresse et recommandent au patient de consulter un spécialiste. Il peut y avoir parfois de la réticence chez certains patients à consulter un psychologue ou un psychiatre, car certains ont beaucoup de peine à demander de l’aide pour ce qui est du champ du «mental». En outre, ils sont déjà pris en charge par de nombreux médecins et soignants, pour certains, allonger encore la liste des rendez-vous médicaux peut être rédhibitoire.

 » Certains patients demandent spontanément de l’aide car ils ont le sentiment de perdre pied. »

Comment apaiser ces blessures de l’âme?

Il faut d’abord comprendre qu’est-ce que la maladie est venue bouleverser chez le patient ? Quel équilibre peut-il retrouver ? Parfois, quelques séances suffisent à rassurer. Pour certains patients, le bouleversement sera plus profond, ils auront besoin d’être accompagnés et épaulés dans cette étape. Il faut aussi aider les patients en rémission à se redéfinir comme des personnes «normales», car beaucoup ne parviennent pas à se sentir comme bien portantes malgré une rémission. C’est comme si elles portaient une blessure que personne ne pouvait voir. Il faut également parvenir à aider les patients à retrouver une estime de soi, notamment sur le plan corporel. On peut les aider à mieux accepter un corps ayant subi des opérations. Avec un accompagnement psychologique, les patients sont amenés à se confronter à l’«après-cancer» : comment redevenir un homme ou une femme après un cancer du sein ou de la prostate ? Comment retrouver une vie sexuelle ? Grâce à la psychothérapie, les patients peuvent améliorer leur moral, retrouver de l’énergie et de la motivation. Un patient qui va bien psychiquement est un patient qui supporte mieux les traitements, les soins. Cela ne peut que faciliter son chemin vers la guérison.

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