Suisse : 16 cancers du sein par jour

Photo by Bogdan Glisik on Unsplash

Le cancer du sein, de nos jours, continue de faire couler beaucoup d’encre. Où en sont les chiffres ? Quels sont les traitements ? Y a-t-il de nouvelles avancées ? Pour en savoir plus, nous avons posé trois questions au Professeur Oscar Matzinger, chef des services de radio-oncologie à la Clinique de Genolier et du Centre d’oncologie des Eaux-Vives à Genève.

Par Thierry Amann

Le cancer du sein progresse-t-il ? A-t-il tendance à reculer ? Quelle est votre analyse de la situation ?

En Suisse, on diagnostique environ 16 cancers du sein par jour. Heureusement, grâce à de nombreux progrès notamment au niveau du dépistage, on détecte le cancer de manière plus précoce, ce qui permet de mieux traiter la maladie. La mortalité liée au cancer du sein baisse d’année en année. Si les nouveaux cas apparaissent très souvent autour des 60-70 ans, on est frappé de constater que de plus en plus de jeunes femmes à partir de 25 ans contractent des cancers du sein. Le cancer progresse dans cette jeune population alors qu’il se stabilise entre 50 et 70 ans. Je dirais aussi que l’évolution de toutes les disciplines liées à l’oncologie (oncologie médicale, radio oncologie, chirurgie) nous promet beaucoup d’espoir dans les prochaines années car elle tend à plus de personnalisation des traitements. Cela nous permet de mieux cibler le cancer.

Il est parfois assez difficile de s’y retrouver entre les traitements. Quelles sont les différences entre la chirurgie, la radiothérapie et la chimiothérapie ?

Nous avons trois zones du corps dans lesquelles le cancer peut se trouver. D’abord une zone locale avec une lésion ou « une grappe» qui pousse à un endroit précis, par exemple dans le sein, c’est ce qu’on va appeler une tumeur primaire. Ensuite, on peut avoir une cellule cancéreuse qui se détache de cette tumeur et qui gagne le liquide lymphatique. Ce liquide va drainer la cellule qui va ensuite être filtrée par des ganglions lymphatiques. La maladie va se placer dans ces ganglions et deviendra alors régionale, car elle se transporte dans une zone en périphérie du sein. Enfin, la cellule cancéreuse peut s’infiltrer dans les vaisseaux sanguins, elle va être transportée par le sang dans notre corps pour aller se fixer n’importe où. Ces cellules vont développer des métastases, on dit alors que la maladie est à distance. Il y a donc une première étape où la tumeur est locale, une seconde régionale et une troisième à distance. Ces différents compartiments atteints nous permettent de choisir entre les différents traitements, et souvent de les associer. La chirurgie traite la maladie au niveau local. La radiothérapie et les rayons X vont traiter la maladie localement, mais aussi sur un volume un peu plus large, on va parler de traitement locorégional. Enfin, la chimiothérapie va traiter l’ensemble du corps. Plus la tumeur est agressive, plus on va compiler les traitements.

« On est frappé de constater que de plus en plus de jeunes femmes à partir de 25 ans contractent des cancers du sein. » 

Qui dit cancer du sein, dit souvent risque de récidive. C’est pour éviter cela qu’il faut compiler les traitements ?

On sait que le cancer du sein est un « multirécidiviste», si on ne fait qu’enlever la tumeur grâce à la chirurgie, effectivement il risque de récidiver. Dans la majeure partie des cas, on va donc rajouter une radiothérapie de l’ensemble du sein pour éviter qu’il ne frappe de nouveau. Le résultat est le même que si on avait enlevé tout le sein de manière chirurgicale, mais cela évite aux patientes des conséquences psychologiques qui peuvent être lourdes de perdre un sein. On évalue ensuite le degré de risque de récidive, s’il y a un risque que les cellules aient été emportées dans le corps par le sang, on va prescrire une chimiothérapie (parfois même avant la chirurgie). Grâce aux avancées de la radiothérapie, de plus en plus ciblée, on peut traiter la partie atteinte par le cancer et préserver les organes sains des radiations. Il n’y aura donc pas d’effets secondaires en dehors du volume traité, cela nous permet d’être à la fois plus précis et de préserver les structures saines qui n’ont pas besoin de ces radiations. Dans certaines situations, il existe également de la radiothérapie intra opératoire. Pendant l’opération chirurgicale après avoir enlevé la tumeur, on peut irradier l’intérieur du sein pendant qu’il est ouvert. Cela évite aux patientes un traitement quotidien de radiothérapie pendant cinq à six semaines. On propose surtout cela à des patientes postménopausées et qui présentent une tumeur précoce. Cela n’est pas pratiqué dans tous les hôpitaux, mais cela vaut le coup que les patientes se renseignent auprès de leur médecin.

Cet article vous a plu ?
Abonnez-vous à la version papier Salle d’attente pour avoir accès à toutes les informations sur le sujet: témoignages, tests, adresses utiles, infographies et autres.
Alors n’attendez-plus !
CHF39.00

Loading

Partagez sur

Facebook

Plus d’articles :

Avec humour et force face à un double diagnostic

L’histoire de Hansruedi Berger montre comment faire face aux difficultés de la vie, on peut garder le sourire. Âgé de 80 ans, il affronte sa maladie chronique avec acceptation, humour et des souvenirs pleins la tête. Depuis qu’un test sanguin a révélé une arthrite rhumatoïde (RA) à laquelle s’est rajoutée une maladie pulmonaire interstitielle (fibrose pulmonaire), sa vie et sa vision des choses ont été boulversées.

Loading

Lire la suite »

Enfance et vision : prévenir pour mieux grandir

Lorsqu’il s’agit de la santé de nos enfants, chaque détail compte, y compris leur vision. La vue est l’un des sens les plus importants pour le développement global de l’enfant, jouant un rôle crucial dans l’apprentissage, la découverte du monde et les interactions sociales. Pourtant, il est souvent difficile pour les parents de savoir quand une consultation est nécessaire ou de reconnaître les signes précurseurs d’un problème visuel. Pour explorer ce sujet essentiel et apporter des réponses concrètes, nous avons rencontré la Dre. Anne Favard, Spécialiste FMH en ophtalmologie à Swiss Visio Lutry et Swiss Visio Martigny, spécialisée dans le traitement des strabismes, qui nous livre son expertise sur les questions de santé oculaire pédiatrique.

Loading

Lire la suite »

L’œil en lumière : structure et secrets

L’œil humain est un organe extraordinaire, complexe et délicat. Il joue un rôle crucial dans notre perception du monde en transformant la lumière en signaux nerveux que notre cerveau interprète comme des images. Relié au cerveau par le nerf optique, l’œil fonctionne comme une caméra naturelle, capturant chaque détail de notre environnement. Mais comment fonctionne cet organe fascinant ? Quels sont les éléments qui le composent et qui permettent cette prouesse ?

Loading

Lire la suite »

Tout savoir sur la cataracte : entretien exclusif

La cataracte est l’une des affections oculaires les plus courantes, affectant principalement les personnes âgées. Ce trouble de la vision peut profondément altérer la qualité de vie si il n’est pas traité à temps. Pour en savoir plus sur cette pathologie et ses traitements, nous avons rencontré le Prof. Christoph Kniestedt, spécialiste renommé en ophtalmologie.

Loading

Lire la suite »

Préserver sa vision face au diabète

Imaginez un monde où chaque couleur, chaque visage aimé, chaque coucher de soleil pourrait s’estomper lentement de votre vue. Pour des millions de personnes atteintes de diabète, ce n’est pas un scénario imaginaire, mais une menace bien réelle. Le diabète ne se limite pas à une simple question de sucre dans le sang ; il peut être un voleur silencieux de vision. Comment protéger nos yeux face à ce danger invisible ? Pour éclairer ce sujet crucial, nous avons rencontré la Dre. Aude Ambresin, spécialiste en ophtalmologie et ophtalmochirurgie.

Loading

Lire la suite »