Maladie rare, des progrès oui, mais le chemin reste long

Selon l’Office fédéral de la santé publique, 7.2%, soit environ 600 000 personnes, sont atteintes d’une maladie rare en Suisse.

Par Adeline Beijns

Trop souvent isolés, les patients peuvent compter depuis sa fondation en 2010 sur l’association ProRaris qui a pour but de représenter et de défendre leurs intérêts et ceux de leurs associations. Entretien réalisé auprès de Jacqueline de Sá, Secrétaire générale et de Yvonne Feri, Présidente de l’association ProRaris.

Le terme « maladie rare » est très vaste. Comment le définit-on ?

Une maladie est considérée comme rare lorsqu’elle touche au maximum cinq personnes sur 10 000 et qu’elle met la vie en danger ou qu’elle est chroniquement invalidante. Aujourd’hui, nous comptons environ 7 000 maladies rares dans le monde. Quant à la Suisse, l’OFSP estime que le nombre de patients représente 7,2% de la population, ce qui équivaut à près de 600’000 personnes. Les maladies dites rares touchent dès lors quand même une large frange de la population, même plus que le diabète.

Où en est la recherche ?

La recherche dans le domaine des maladies rares est particulièrement difficile, car la population étudiée est limitée et hétérogène. Nous sommes néanmoins confiants, car de nouvelles thérapies prometteuses sont arrivées sur le marché ces dernières années.

Outre la souffrance liée à la maladie, quels sont les obstacles auxquels les patients doivent régulièrement faire face ?

Ils sont hélas fort nombreux mais je dirais qu’il en existe cinq principaux. Le premier est la pose du diagnostic qui peut prendre parfois de très nombreuses années, laissant le patient dans l’errance diagnostique et thérapeutique. La difficulté à poser un nom sur la maladie vient non seulement de son caractère rare mais aussi du fait que, bien souvent, les symptômes du patient ne sont pas suffisamment spécifiques et pourraient concerner de nombreuses maladies. Une fois le diagnostic établi, vient le deuxième obstacle à savoir, trouver une thérapie efficace.

Et cela conduit au troisième obstacle qui est le financement, souvent très onéreux, de ce traitement médical qui n’existe que pour quelques patients ou qui n’existe que de manière isolée et pas encore de manière officielle. Il est également difficile d’obtenir le remboursement des frais de traitement par l’assurance maladie si le diagnostic n’a pas été posé ou l’a été de manière incorrecte. Ensuite, si le malade est en mesure de travailler, encore faut-il que son employeur accepte qu’il soit souvent absent pour raisons médicales et que son évolution au sein de la société soit incertaine. Cela est loin d’être évident. Enfin, je dirais que le dernier obstacle est l’acceptation de la maladie par le patient. Il est dès lors très important qu’il partage son expérience et son parcours avec d’autres personnes dans des situations similaires. Nous pouvons aider à la mise en réseau avec d’autres personnes concernées ou une association spécifique à la maladie.

Quelles sont les solutions qui s’offrent aux patients et à leur famille ?

En ce qui concerne la prise en charge thérapeutique, les malades peuvent à présent compter sur les 9 centres suisses spécialisés dans les maladies rares.

Outre la pose du diagnostic, ces établissements permettent de créer un véritable réseau autour du patient, fait de spécialiste qui travaillent ensemble et s’organisent pour donner le meilleur traitement aux malades tout en assurant la transmission de connaissances relatives à ces maladies.

Comment l’association ProRaris soutient-elle les patients et leurs proches ?

ProRaris est la faîtière des associations de patients du domaine des maladies rares, dont l’objectif est de faire de la problématique des maladies rares un enjeu majeur de santé publique. Pour cela, nous contribuons à la mise en œuvre des mesures du concept national maladies rares et, en tant que représentant des patients, nous nous engageons à ce que les patients concernés bénéficient d’un accès équitable aux soins de santé, ce qui implique l’accès à un diagnostic, à des soins médicaux appropriés, à une reconnaissance par les assurances sociales et à un soutien psychosocial.

Quelles ont été les dernières actions concrètes pour faire avancer la recherche et la prise en charge des patients atteints de maladies rares ?

Il y en a essentiellement deux à savoir l’établissement de centres spécialisés mais aussi le développement d’un registre des malades rares dont le but est non seulement la visibilité mais aussi l’épidémiologie de ces affections. Ce registre permet aussi de créer un réseau autour des patients et de promouvoir la recherche en informant les patients, s’il le souhaite, des éventuelles études qui seraient menées. Ces deux nouveautés sont une véritable valeur ajoutée pour les patients et leur famille même si le chemin est encore long pour une prise en charge et une reconnaissance optimale.

Yvonne Feri, Conseillère nationale, vous avez récemment repris la direction de l’association en tant que présidente. Quelles sont vos mission et vision pour les patients ?

Pour améliorer la qualité de vie des personnes atteintes de maladies rares, il faut une alliance forte des associations de patients qui fasse valoir les préoccupations et les besoins des personnes concernées dans les discussions politiques et professionnelles. Je souhaite m’engager pour que ProRaris Alliance Maladies Rares soit systématiquement impliquée en tant que voix compétente des patients et que le travail d’expertise de ProRaris soit rémunéré de manière appropriée.

Les conditions de vie des personnes atteintes de maladies rares et de leurs proches peuvent être améliorées de manière décisive par un accès à bas seuil à des informations, des thérapies et des conseils de qualité, par des diagnostics posés à temps, par le remboursement des médicaments et par des offres de décharge pour les proches aidants. En tant que présidente de ProRaris, il me tient à cœur de revendiquer ces améliorations avec persévérance.

ProRaris fête ses 13 ans en 2023, qu’avez-vous prévu pour la Journée des maladies rares qui se tiendra le 4 mars prochain ?

Nous organiserons un webinaire sur le thème « Implication des patients dans la recherche clinique et le système de santé ». Nous souhaitons présenter différents exemples et donner la parole aux représentants des patients. Les opportunités et les défis de l’implication des représentants des patients seront également discutés. L’événement est ouvert à toutes les personnes intéressées.

A la découverte de l’association ProRaris :

https://www.proraris.ch

Cet article vous a plu ?
Abonnez-vous à la version papier Salle d’attente pour avoir accès à toutes les informations sur le sujet: témoignages, tests, adresses utiles, infographies et autres.
Alors n’attendez-plus !
CHF39.00

Loading

Partagez sur

Facebook

Plus d’articles :

Solitude et cancer, briser la spirale infernale

Affronter un cancer est une expérience brutale, nous le savons tous. Hormis la lourdeur des traitements et l’incertitude quant à leur issue, nombreuses sont les personnes à confesser que le plus dur à vivre est la solitude voire le sentiment d’incompréhension que l’on peut ressentir au cours de cette épreuve. Les choses changent, fort heureusement.

Loading

Lire la suite »

L’allaitement, cette arme anti-cancer

L’allaitement maternel présente des avantages pour la santé du bébé et de la mère. Selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), l’allaitement maternel est l’un des moyens les plus efficaces de garantir la santé et la survie des jeunes enfants. Les femmes qui allaitent ont également un risque réduit de cancer du sein et des ovaires. 

Loading

Lire la suite »

Échapper à la chimiothérapie ?

En Suisse, ce sont plus de 6’000 femmes qui découvrent chaque année qu’elles sont atteintes d’un cancer du sein. De nos jours, les patientes peuvent bénéficier d’un suivi optimal, grâce à l’expansion des centres du sein certifiés et dans certains cas, éviter une chimiothérapie, grâce au test génomique.

Lire la suite »

Le cancer du sein triple négatif, agressif et plutôt rare

Forme particulièrement agressive de la maladie, le cancer du sein triple négatif ne représente qu’environ 15% des cas. La difficulté de son traitement est liée au fait que ce type de cancer ne présente aucun marqueur, à la surface des cellules cancéreuses, susceptible de répondre à une thérapie ciblée existante.

Loading

Lire la suite »